Un blog pour se remuer les neurones et se secouer les fesses !
Un blog pour encourager tous ceux qui n'ont pas envie de se laisser aller avec non-garantie de succès, ni pour eux, ni pour moi-même. ;-)

samedi 27 novembre 2010

Les Armes secrètes, Julio CORTAZAR, 1959 (ARG)


Les Armes secrètes de Julio Cortazar, 1959 (ARG).
(Recueil de nouvelles) Lecture achevée le samedi 27 novembre 2010.
**Bien.

Critique globale : de très beaux passages mais je ne me souviendrai personnellement d’aucune nouvelle marquante. Pourquoi ? Je ne sais pas. Peut-être à cause de la traduction, je ne sais pas. Je sens que je suis injuste. Mais ce n'est pas "l'Autouroute du Sud", nouvelle simple, sobre et magnifique.
Avec du recul : "L'homme à l'affût" est une nouvelle qui m'a vraiment touchée au plus profond.
Je ne comprends pas trop pourquoi "les Armes secrètes" donne le titre du recueil...

"Lettres de Maman" : C’est l’histoire d’un frère qui vit très mal le fait d’avoir pris la fiancée de son frère, malade, puis décédé. Luis et Laura, argentins, suite à ce décès se sont exilés à Paris. Il reçoit régulièrement des lettres de sa mère d’Argentine jusqu’au jour, où elle écrit « Nico » comme s’il était encore vivant. Cela met Luis dans tous ses états, parce que jusqu’à présent, tout le monde faisait attention de ne jamais l’évoquer. Ce qui est décevant, sauf si la traduction est mauvaise ou tout simplement que je n’ai pas su la comprendre, c’est la chute. Je ne comprends pas la chute : si quelqu’un l’a comprise, qu’il me l’explique en commentaire. Je suppose que les dernières paroles font référence à Boby le chien, mais je n’en suis même pas sûre.

Citations :
« Un jour, il s’était enhardi à dire à Laura : « Si l’on pouvait déchirer et jeter le passé comme le brouillon d’une lettre ou les épreuves d’un livre. Mais il demeure obstinément et entache le texte définitif et je crois que c’est cela le futur véritable », p. 10-11.
« Les lettres restaient deux ou trois jours sur la table à dessin, Luis aurait voulu les jeter dès qu’il y avait répondu mais Laura les relisait, les femmes aiment relire les lettres, les regarder en tous sens, elles semblent en extraire une signification nouvelle chaque fois qu’elles les relisent », p.13-14.
« Un soir, après avoir parlé à Nico, déjà malade, Luis s’était juré de s’échapper d’Argentine, de la villa de Flores, de Maman, des chiens et de son frère (déjà malade). », p.15

"Bons et loyaux services" : L’histoire d’une femme honnête et simplette, Madame Francinet, qui se fait avoir par une bande de cons superficiels et cupides : Monsieur et Madame, ainsi que ceux leurs amis. Ils lui demandent de garder leurs chiens ainsi que de leurs amis durant une soirée en se souciant davantage pour leur chien respectif que d’elle. Pendant qu’ils s’amusent follement, mangent, boivent et dansent comme des fous, elle est seule assise sur une chaise dans une pièce mal éclairée obligée de subir des chiens mal éduqués et tombant de sommeil. Mais personne ne lui propose rien, tout le monde s’en fout. Jusqu’à la toute fin de la soirée, où une seule personne lui propose une coupe de champagne : Monsieur Bébé. La seule personne qui aura eu un geste d’humanité envers elle. Elle sera finalement payée 1400 francs pour ce service, rentrant à pied chez elle sous la neige avec une heure de marche sans que personne ne lui ait proposé de la ramener en voiture…
Suite à cette histoire, on la sollicite de nouveau pour un nouveau service, rémunéré plus avantageusement cette fois-ci (20.000 francs) : Monsieur Bébé (enfin son vrai nom est M. Linard), qui était en fait un grand couturier vient de mourir, on lui demande de jouer la mère éplorée afin de lui rendre un hommage décent devant la presse. Elle croit à la noblesse de son service alors qu’en fait, cela n’a rien à voir : les personnes qui lui demandent cela s’apprêtent à reprendre la succession de la maison de couture de Monsieur Bébé et à s’enrichir. Ils avaient besoin d’elle pour ne pas paraître suspects de son meurtre (c’est ce qu’on devine). Mais elle, bonne poire, continue de croire à la noblesse de son geste.
La scène la plus pathétique est à la fin, lorsque Mme Francinet pleure toutes les larmes de son corps sans aucune comédie. Une vraie chute de nouvelle, quoi.

"Les fils de la vierge" : Un écrivain, Roberto Michel, doit traduire un livre du français en espagnol et il s’ennuie durant ce travail laborieux d’autant plus qu’il se dédouble en Roberto (lui)/Michel (son double photographe). Alors comme il est photographe à ses heures perdues à travers Michel, il s’amuse à prendre des gens et à interpréter leur histoire style Michel Butor dans La Modification, quand le narrateur est dans le train. C’est vrai que les plus belles photos sont narratives, mystérieuses : ça donne envie de s’y mettre sérieusement. Le problème, c’est de ne pas se faire attraper et d’avoir un très bon appareil, or le narrateur lui-même se fait surprendre en train de prendre des photos d’inconnus mécontents. Bref, du coup Roberto Michel se met à broder toute une histoire entre un jeune homme et une femme plus mûre à qui il attribue les pires intentions. Il la voit comme une dépuceleuse méchante et le jeune homme comme une pauvre victime en plein apprentissage.

Citations :
« Toujours raconter, toujours se délivrer de ce chatouillement désagréable au creux de l’estomac », p.85
« Je sais que le plus difficile va être de trouver la bonne manière de raconter tout ça, mais je n’ai pas peur de me répéter. Cela va être difficile parce qu’on ne sait au juste qui raconte, si c’est moi ou bien ce qui est arrivé ou encore ce que je vois (des nuages et de temps en temps un pigeon) ou bien si, tout simplement, je raconte une vérité qui n’est que ma vérité, mais alors ce ne sera la vérité que pour mon estomac, que pour cette envie de m’enfuir et d’en finir au plus vite avec ça, quoi que ce puisse être. », p.85-86.

« Si tant est que je sache faire quelque chose, je crois que je sais regarder et je sais aussi que tout regard est entaché d’erreur, car c’est la démarche qui nous projette le plus hors de nous-mêmes et sans la moindre garantie, tandis que l’odorat…(mais Michel s’éloigne facilement de son sujet, il ne faut pas le laisser déclamer à tort et à travers), p.89-90.

« Elle était mince et svelte, deux mots injustes pour dire ce qu’elle était (…), un visage pâle et sombre –deux mots injustes- (…) », p.90

« Michel est coupable de littérature, d’échafaudages invraisemblables. Rien ne lui plaît tant que d’imaginer des exceptions, des individus hors de l’espèce commune, des monstres qui n’ont pas forcément un aspect répugnant. », p.96 : MA-GNI-FIQUE.

« Je me limitai donc à répondre que non seulement il n’est pas défendu de prendre des photos dans les lieux publics, mais que cet art jouit de la plus grande estime officielle et privée », p.96-97

« Mais les fils de la vierge s’appellent aussi dans mon pays la bave du diable », p.97 (cf. explication de cette expression qui m’était inconnue à la fin de ce message, trouvée sur : http://www.bmlisieux.com/normandie/dubosc48.htm ).

"L’homme à l’affût" : Un critique de jazz raconte l’histoire de son ami Johnny, un musicien génial qui est complètement fou et le perturbe, lui et ses idées raisonnables. C’est la nouvelle sans doute la plus recherchée, parce que la plus complexe. Johnny, complètement drogué, pète souvent un plomb : il a des hallucinations.qui lui font perdre pied hors de la réalité de façon croissante. C’est une réflexion sur la folie, la raison, l’art et la critique de l’art, l’amitié, le sens de la vie. La suite est prévisible.

Citations : « Sur le moment, je sais que ce qu’il me dit n’est pas simplement dû au fait qu’il est à moitié fou, que la réalité lui échappe et lui laisse en échange de parodie qu’il convertit  en espérance. », p.125

« La croûte de l’habitude a éclaté en mille morceaux et ses défenseurs eux-mêmes (dans les orchestres, dans le public) ne l’ont plus soutenue que par amour-propre. Depuis que Johnny est passé par le saxo-alto on ne peut plus considérer les musiciens précédents comme des génies. Il faut bien en venir à cette espèce de résignation déguisée qui s’appelle le sens historique et dire que ces musiciens ont été remarquables en leur temps. Johnny est passé par là comme une main qui tourne une page et on n’y peut rien. », p.131

« J’envie Johnny et en même temps j’enrage qu’il se détruise en employant si mal ses dons, en accumulant stupidement folie sur folie parce que la vie le soumet à des pressions trop fortes. », p.135

« Que la musique sauve au moins la fin de la soirée et accomplisse une de ses plus détestables missions, celle de nous mettre un bon paravent devant le miroir, de nous rayer de la carte pour quelques heures », p.140

« La marquise, par exemple, croit que Johnny a peur de la misère, elle ne comprend pas que la seule chose que puisse redouter Johnny c’est de ne pas trouver une côtelette à portée de son couteau quand il a envie d’en manger une, ou un lit quand il a sommeil, ou cent dollars dans son portefeuille quand il a envie de les dépenser. », p.143

« Tu comprends (…) ce type-là et tous les autres types (…), c’était des convaincus. Convaincus de quoi, tu vas me dire ? Je ne sais pas s’ils étaient convaincus. De qu’ils étaient je suppose, de ce qu’ils valaient, de leurs diplômes. Non, c’est pas ça. Il y en avait de modestes et qui ne se croyaient pas infaillibles. Mais même le plus modeste était sûr de lui. Et c’est ça qui me foutait en boule, Bruno, qu’ils se sentent sûrs d’eux. Sûrs de quoi, dis-moi un peu, alors que moi, un pauvre diable pestiféré, j’avais assez de conscience pour sentir que le monde n’était qu’une gelée, que tout tremblait autour de nous et qu’il suffisait de faire un peu attention, de s’écouter un peu, de se taire un peu pour découvrir les trous. (…) Je ne sais pas si tu as remarqué comme le paysage se casse en mille morceaux quand tu le regardes s’éloigner… », p.150-151

« Tu te rends compte à quel point c’est terrible qu’il ne se passe rien ? Tu coupes le pain, tu lui plantes le couteau dans le cœur et tout continue comme avant. Je ne comprends pas, Bruno », p.154. J'ADORE ! Je comprends tellement ce qu'il veut dire...C'est affreux, c'est le drame de ma vie. ;-)/

« N’importe qui pourrait être Johnny, simplement en acceptant d’être un pauvre diable malade et vicieux, sans volonté, plein de poésie et de talent. Apparemment. Moi qui ai toute ma vie admiré les génies, les Picasso, les Einstein, toute la sainte liste que chacun peut dresser en cinq minutes (et Gandhi et Chaplin et Stravinsky) je suis prêt à admettre que ces phénomènes vivent dans un monde à part et qu’avec eux il ne faut s’étonner de rien. Ils sont « différents », il faut toujours en revenir là. », p.155.

« Mais ça, c’est un autre sujet, ce que je cherchais à comprendre c’est pourquoi ce qui rend Johnny différent de nous est inexplicable, pourquoi cela réside point en des différences visibles. Et il me semble aussi qu’il est le premier à en souffrir et que cela l’affecte autant que nous. On aurait presque envie de dire que Johnny est comme un ange parmi les hommes, mais une élémentaire honnêteté nous oblige à rengainer la phrase, à la retourner comme une crêpe, à reconnaître que Johnny est plutôt un homme parmi les anges, une réalité parmi toutes ces irréalités que nous sommes. C’est pour cela peut-être, que Johnny me touche si souvent le visage de ses mains et que me sens alors si malheureux, si transparent, si peu de chose avec ma bonne santé, ma maison, ma femme, ma réputation. Ma réputation surtout. Surtout ma réputation.
Mais c’est toujours la même chose, à peine ai-je été hors de l’hôpital, à peine ai-je mis le pied dans la rue, dans l’heure, dans tout ce que j’avais à faire, que la crêpe s'est retournée doucement en l'air et est retombée à l'envers. Pauvre Johnny tellement en dehors de la réalité. (C'est ainsi, c'est ainsi. Il m'est plus facile de croire que c'est ainsi, maintenant que je suis dans un café, deux heures après ma visite à l'hôpital, plutôt que de croire tout ce que j'ai écrit plus haut en me forçant comme un damné à être au moins un peu décent envers moi-même », p.156

« - Bon, eh bien, je jouerai aussi un peu de Bach et un peu de Charles Ives, a dit Johnny condescendant. Je ne sais pas pourquoi les Français n’aiment pas Charles Ives. Tu connais ses chansons ? Celle du léopard surtout, il faut que tu apprennes celle du léopard : A leopard… », p.173

« (…) Les créateurs, eux, depuis l’inventeur de la musique jusqu’à Johnny en passant par toute leur fichue kyrielle, sont bien incapables de tirer les conséquences dialectiques de leur œuvre, de postuler les raisons et la transcendance de ce qu’ils écrivent ou improvisent. Il faudrait que je m’en souvienne dans les moments de dépression, quand je trouve pitoyable de n’être qu’un critique. », p.176

« Mais ce n’est pas de ta faute si tu n’as pas su écrire ce que, moi non plus, je ne suis pas capable de jouer. Quand tu dis, par exemple, que ma véritable biographie est dans mes disques, je sais que tu es en persuadé, et puis ça sonne bien, mais ce n’est pas vrai. Seulement, comme je ne suis pas arrivé moi-même à jouer comme j’aurais dû, à jouer ce que je suis vraiment… (… ) », p.181.

« Au fond la seule chose qu’il ait dite, c’est que personne ne sait rien de personne, ce qui n’est pas une nouveauté », p.181.

« - Je suis aussi seul que ce chat, et beaucoup plus seul parce que je le sais et lui pas. », p.183

« (…) il n’y avait pas d’après…Pendant un moment il n’y a eu que toujours. Et je ne savais pas, moi, que c’était un mensonge, que ça arrivait parce que j’étais perdu dans la musique et qu’à peine je m’arrêterais (… ) je tomberais la tête la première au fond de moi… », p.186

« - J’ai l’impression d’avoir voulu nager dans un bassin vide, murmure Johnny. », p.186

« Il est comme ce que joue Satchmo, si pur, si propre. Tu ne trouves pas que ce joue Satchmo c’est comme un anniversaire ou une bonne action ? Et nous…Je te dis que j’ai voulu nager dans un bassin vide. J’ai cru, faut être idiot, j’te jure, j’ai cru qu’un jour je trouverais autre chose. (…) Moi j’avais mon saxo…et mon sexe comme dit ton livre. Tout pour être heureux, quoi. Des pièges, mon vieux…parce que c’est pas possible qu’il n’y ait pas autre chose, c’est pas possible qu’on soit à la fois si près de la porte et si complètement de l’autre côté… », p.186

"Les armes secrètes" : Nouvelle très psychanalytique étrange et fantastique car ne s’explique pas de façon clairement rationnelle. Un jeune homme, le narrateur est amoureux sans vraiment l’être d’une fille qui est amoureuse sans vraiment l’être : ils ne se connaissent pas bien. Il se sent mal. Elle aussi. La fin « expliquera » les raisons de ce malaise mutuel, ça et le titre : la seule explication possible, c’est le lien entre le titre et les…feuilles mortes.

Citations :

« Il n’y a rien de tel que de partager un oreiller. Ça vous éclaircit les idées. Parfois même ça les supprime carrément, comme ça on est tranquille. », p.210

« (…) et c’est soudain comme si une volée de feuilles mortes lui sautait au visage et le dévorait d’une seule morsure horrible et noire. », p.211 (illustration en espagnol possible de mon poème sur les feuilles mortes).


DUBOSC, Georges (1854-1927) :  Les fils de la Vierge (1899).


Saisie du texte : S. Pestel pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (20.IX.2008)
Texte relu par : A. Guézou
Adresse : Médiathèque André Malraux, B.P. 27216, 14107 Lisieux cedex
-Tél. : 02.31.48.41.00.- Fax : 02.31.48.41.01
Courriel : mediatheque@ville-lisieux.fr, [Olivier Bogros] obogros@ville-lisieux.fr
http://www.bmlisieux.com/


Diffusion libre et gratuite (freeware)


Orthographe et graphie conservées.


Première parution dans le Journal de Rouen du 17 septembre 1899. Texte établi sur l'exemplaire de la médiathèque (Bm Lx : norm 1496) de Par-ci, par-là : études d'histoire et de moeurs normandes, 7ème série, publié à Rouen chez  Defontaine en 1929.



Les fils de la Vierge
par
Georges Dubosc
~*~
C’est toujours un merveilleux spectacle que celui de l’automne en nos campagnes normandes. Tandis qu’à l’horizon, la forêt jaunissante, tachée de pourpre par endroits, forme une toile de fond au décor splendide, en avant les près, au soleil levant, étincellent de mille feux produits par la rosée. Dans les herbes et dans les chaumes brillent d’innombrables filaments, soyeux et légers, sur lesquels les gouttelettes de la rosée miroitent encore plus vivement. De loin, pour le chasseur qui traverse la plaine, ou pour le petit soldat en manoeuvres de septembre, on dirait un immense tapis blanc reflétant les rayons du soleil, tandis que sur la route ces mêmes fils, si fins, si ténus, si souples, si argentés, accrochés aux arbres, flottent et ondulent dans l’air matinal.

Bientôt, on en est couvert. Ces légers filaments adhèrent aux vêtements, aux chapeaux de paille ; les uns viennent se fixer contre le visage et produisent une sensation légère qui, à la longue, finit par devenir agaçante ; les autres, plus ténus, passent au-dessus de votre tête, emportés par la brise. La campagne en est toute blanche et le paysan, les voyant s’élever de tous côtés, pense en lui-même : « L’hiver sera dur cette année ». Ils portent un nom bien gracieux, ces filaments ondoyants que l’automne nous envoie. Dans toutes nos vieilles provinces françaises, ce sont les Fils de la Vierge. C’est, suivant les antiques légendes, les fils provenant de la quenouille de la mère de Jésus-enfant. Pendant qu’il sommeille, la Vierge assise les file de ses doigts menus au bout de son fuseau, et les laisse s’éparpiller dans l’air, pour rendre plus chaud, l’hiver, le nid des oiselets.

Telle est la version normande ; mais en d’autres pays, la légende devient plus sombre. Le « fil de la Vierge » serait destiné à tisser le linceul de mort des miséreux qui tombent abandonnés au coin d’un bois, au revers du talus d’un fossé, le long de la grande route. Ce ne serait plus, comme la morne chanson des Tisserands, de Gérard d’Hauptmann, le pauvre artisan qui, lui-même, tisserait son drap funèbre ; c’est la Vierge mère qui prendrait souci de cette tâche. A l’un des derniers salons, le peintre F. Lucas avait donné une nouvelle version de la légende. Marie, humble, candide, s’est endormie sur la terrasse que dore le soleil couchant. La nuit vient. Un vol de bergeronnettes s’est abattu autour du rouet silencieux et, becquetant la laine blanche, elles emportent les fils ténus pour les semer dans la campagne aux branches des buissons. Quoi qu’il en soit, riante ou sombre, la légende existe, et le « fil de la Vierge » est entouré, dans nos campagnes, d’une sorte de superstitieux respect.

Notre siècle positif, qui difficilement admet ces contes symboliques, a voulu savoir le pourquoi exact de ces filaments épars et volants, leur nature, leur origine. Il a voulu savoir ce qu’était le mystérieux « fil de la Vierge », et il a trouvé qu’il était en tous points semblable aux fils des toiles d’araignée que nous voyons dans les vieux greniers et dans les coins où le plumeau de la ménagère va les déloger sans souci de la bestiole qui les a tissés ; s’ils sont plus blancs, plus argentés, c’est tout simplement qu’ils ont été filés en plein air, au soleil, loin des poussières qui les souillent en nos logis.

Ainsi que l’a démontré, le premier, le naturaliste Latreille, ces fils sont dus à une aranéide tendeuse et fileuse, connue en France sous le nom d’épeire diadème ou araignée de jardin. Elle est roussâtre, veloutée, avec un abdomen très volumineux, portant sur le dos une triple croix jaune ou blanche. C’est elle qu’on rencontre fréquemment à l’automne dans nos jardins, où elle tisse de larges rosaces verticales. Pour cela, elle secrète sa soie par quatre mamelons, qui sont eux-mêmes percés d’une infinité de petits trous.

(...)

17 Septembre 1899. GEORGES DUBOSC

vendredi 26 novembre 2010

L’Extase des Anges, Koji Wakamatsu, 1972 (JPN).



L’Extase des Anges, Koji Wakamatsu, 1972 (JPN).
***Très bon.

Histoire : Je suppose que ça présuppose une connaissance précise de ouf sur le contexte historique précis de l’histoire : or, moi j’ai toujours été nulle en histoire.
Donc les incultes comme moi se contenteront de l’intrigue : un groupe révolutionnaire politique style communiste, et terroriste appelé « Les Quatre Saisons » se divise en factions hiérarchisées logiquement selon leur ordre dans le calendrier : la saison ; le mois ; le jour de la semaine.
Ils font face à un conflit interne qui donne la problématique de tout le film : « Une révolution politique, sociétale, est-elle possible collectivement ? Individuellement ? ».
S’ensuit un film délirant où chaque personnage a un nom soit de saison, de mois ou de jour de la semaine et comme ils se disputent beaucoup ou font l’amour, les dialogues sont surréalistes quand ils se nomment : j’adore. C’est génial comme idée, c’est tellement japonais d’utiliser la Nature par un moyen ou un autre.
Exemple : « Je suis Automne et tu es Octobre, j’aimerais mieux te connaître. », dit-elle en faisant l'amour, c’est pas génial, ça ? (Ah oui : Automne (la chef) est amoureuse d’Automne (le gosse beau qu’elle commande).
Le film quant à lui est en noir et blanc et par moments, en couleurs, ça aussi, c’est beau.
Enfin, ce film fait tout à fait nouvelle vague, style existentialiste, les Mains Sales (l’apprentissage de la politique et de ses désillusions individuelles), très français, parisien, Jeanne Moreau (Vendredi chante style music-hall, en japonais et toutes les femmes sont maquillées au crayon noir avec des yeux de biche), sur fond de jazz endiablé (on voit même un jazz band japonais jouer très bien).
Bref, un film qui mêle très bien esprit français et esprit japonais.

L’histoire plus en détails :
Automne (chef femme, héroïne du film) et Hiver (chef homme) sont les seules saisons à être évoquées néanmoins, pas de nouvelles d’Eté et de Printemps (après réflexion : ce sont les saisons les plus heureuses, donc qui ont moins d’histoires à raconter, non ?).
Sous les ordres d’Automne, il y a Octobre (sous-chef, héros du film) qui à son tour commande Lundi (un homme), Vendredi (une femme) et Samedi (un jeune néophyte).
Mais que se passe t-il ? Alors que le groupe d’Octobre, sous les ordres d’Automne avait pris des bombes à l’armée américaine, « Hiver » vole les armes d’Octobre en torturant Lundi et Vendredi.
En fait : suite à ce vol, nombreux ont été tués (on suppose : mercredi, jeudi et dimanche par exemple) et leur chef, Octobre, est devenu aveugle. Donc, les Quatre Saisons ont estimé que cette faction ne valait plus rien, donc a exigé d’Hiver de prendre leurs armes, fruits pourtant de leurs actes héroïques.
Lundi et Vendredi ont été torturés (et Vendredi violée ce qui est assez horrible) par le groupe d’Hiver et Automne a accepté de rejoindre Hiver en abandonnant Octobre et son groupe.
Ils comprennent que la révolution en groupe est une belle illusion et avec Octobre, ils décident de faire leur révolution individuellement avec le peu d’armes qui leur reste à eux. Blasés, ils font l’amour aussi, au moment où le jeune crétin inexpérimenté Samedi fait une crise de révolte politique : cette scène a beaucoup de sens.
En effet, le jeune crétin qui a des idéaux, n’a pas vécu l’horrible torture qu’ont dû endurer Lundi et Vendredi. Ces derniers qui semblent si légers, ont beaucoup souffert pour leurs idéaux. Ils représentent, par leur acte sexuel désinvolte, une désillusion profonde, en connaissance de cause.
Par ailleurs, Samedi est l’espion d’Automne et joue un double-jeu entre elle et Octobre, son chef direct jusqu’au jour, où enfin devenu plus mûr et courageux, il prend le parti de ce dernier.

Idée : rétrospective Koji Wakamatsu à la Cinémathèque française fin novembre 2010 début décembre. 







mercredi 24 novembre 2010

QUAND L'EMBRYON PART BRACONNER, Koji WAKAMATSU, 1966 (JPN)


Quand l’embryon part braconner, Wakamatsu, 1966 (JPN)
***Très bon.

L’histoire : Il était une fois une jeune femme moderne qui suit un homme chez lui qu’elle ne connaît pas, pour prendre du plaisir…
Mais cet homme, ben c’est pire qu’un grand méchant loup : il ne l’attire pas chez lui pour la baiser, mais pour lui faire subir les pires humiliations verbales et physiques.
Ce film, c’est donc à peu près une heure de torture physique et mentale sur cette femme, mais aussi toutes les spectatrices.
Une grande leçon de morale pour toutes celles qui auraient envie de « juste » s’amuser…On y songe à deux fois…

Critique : c’est bien filmé, ça, y a rien à dire, le noir et blanc passe tout seul ; quelques références culturelles (par exemple une citation de Job, en introduction, référence que je ne suis pas mécontente d’avoir apprise à mes quatrièmes) ; Marie-Antoinette (vite fait) et de nombreuses images anamorphiques en arrière-plan difficiles à discerner clairement, du moins sur un écran d’ordinateur. Bref, c'est sobre, concis, précis et enrichi juste ce qu'il faut, avec quelques flashbacks tout à fait compréhensibles.
Je dirais que c’est la version adulte du Petit Chaperon rouge (cette fois-ci que j’étudie avec mes sixièmes en ce moment…). Les filles : non seulement il faut faire super attention à ne pas coucher avec n’importe qui et ne pas prendre le don de son corps et de son âme à la légère, mais en plus, dites-vous bien qu’un mec qui n’est pas terrible au lit, il va vous en vouloir si ça le bouffe trop mentalement…Donc homme impuissant, même si super beau gosse, à fuir ! 
Très peu japonais, ce film est un hommage au travail de Sigmund Freud (lol : vous comprendrez pourquoi) ; les personnages sont habillés à l’occidentale (sauf sa femme, en kimono dans une scène) et il n’y a aucune référence explicite à la culture japonaise (dommage !).
Franchement, pour filmer des choses pareilles, il faut évidemment en éprouver du plaisir sadique et je ne doute pas que ce film ait dû en faire bander plus d’un…Le réalisateur, je lui aurais pas spécialement couru après…
Mais bon, le personnage du méchant est tellement caricatural que bon, la distinction entre le bien et le mal est effectuée.
Je comprends tout à fait que ce film ait été interdit aux moins de dix-huit ans et dieu sait que je ne suis pas catholique pour un sou : on a tout le temps de découvrir que l’être humain est malade, laissons encore un peu de temps à ceux qui en ont encore, le peu d’innocence qui leur reste, voilà mon avis.

Idée : Grande rétrospective Koji Wakamatsu qui démarre demain à la Cinémathèque française, j’envisage de prendre une carte d’abonnement, mais je ne pourrai pas aller physiquement à toutes les séances…





samedi 20 novembre 2010

AS I LAY DYING, William Faulkner, 1930 (USA)

Lecture achevée le samedi 20 novembre 2010

As I lay dying (Tandis que j’agonise) William Faulkner, 1930 (US).

**Mon évaluation ne veut rien dire : je l’ai lu en anglais, or je ne suis pas bilingue : j’ai compris toute l’histoire, mais la poésie…non. Or l’intérêt chez Faulkner, ce n’est pas l’histoire, c’est le style.

L’histoire : Il s’agit d’une famille qui part de leur village paumé jusqu’à la ville pour enterrer la mère, décédée. Le voyage va durer neuf jours parce qu’ils vont rencontrer des obstacles. Durant ce périple, chaque personnage exprime ses pensées et on découvre les soucis de chacun.

Critique : Plusieurs petits suspenses créés par l’auteur qui motivent le lecteur,  à chaque fois récompensé quelques chapitres plus loin.
 Je suis parfaitement d’accord avec une lectrice qui écrivait à propos de ce livre qu’elle n’aimait pas ce qu’elle lisait, mais qu’elle voulait savoir la suite. Faulkner est comme ça, on veut toujours savoir la suite, parce qu’il arrive à créer du suspense à propos d’une histoire qui ne nous intéresse pas : trop fort.
 La fin est juste horrible et donne du sens au titre (qui vient de l'Illiade d'Homère).

Citations (en dialecte du Mississipi) :
« But I told her it wasn’t luck in it, because the Lord put roads for travelling ; why He laid them down flat on the earth. When He aims for something to be always a-moving. He makes it long ways, like a road or a horse or a wagon, but when He aims for something to stay put, He makes it up-and-down ways like a tree or a man. And so he never aimed for folks to live on a road, because which gets there first, I says, the road down by a house ? I says. No you never, I says, because it’s always men can’t rest till they gets the house set where everybody that passes in a wagon can spit in the doorway, keeping the folks restless and wanting to get up and go somewheres else when He aimed for them to stay put like a tree or a stand of corn. Because if He’d a aimed for man to be always a-moving and going somewheres else, wouldn’t He a put him longways on his belly, like a snake ? It stands to reason He would. » (Anse, le père), p. 30,31.
* Voilà, c’est à cause de ce paradoxe que j’arrive pas à me poser en douze ans de vie parisienne.

« When I was young I believed death to be a phenomenon of the body ; now I know it to be merely a function of the mind – and that of the minds of the ones who suffer the bereavement. The nihilist say it is the end ; the fundamentalists, the beginning (…) », (Peabody, le médecin), p.38-39.

« Now and then a fellow gets to think about it. Not often, though. Which is a good thing. For the Lord aimed for him to do and not to spend too much time thinking, because his brain it’s like a piece of machinery : it won’t stand a whole lot of racking. It’s best when it all runs along the same, doing the day’s work and not no one part used no more than neeedful.
I have said and I say again, that’s ever living thing the matter with Darl : he just thinks by himself too much. Cora’s right when she she says all he need is a wife to straighten him out. And when I think about that, I think that if nothing but being married will help a man, he’s durn nigh hopeless. But I reckon Cora’s right when she says the reason the Lord had to create women is because man don’t know his own good when he sees it ». (Tull) p, 64-65.

* Version moderne : je suis tout à fait d’accord avec l’anti-masturbation mentale nuisible à l’homme, mais au lieu de parler de mariage,  je parlerai de sexe et si possible d’Amour. Et moi non plus je ne sais pas ce qui est bon pour moi, j’ai peut-être besoin d’une femme aussi, je ne sais pas…
« I don’t know what I am. I don’t know if I am or not. Jewel know he is, because he does not know that he does not know whether he is or not. He cannot empty himself for sleep because he is not what he is and he is what he is not », (Darl, le fou de la famille), p.73

*« Je ne sais pas ce que je suis. Je ne sais pas si je suis ou non. Jewel sait qu’il est, parce qu’il ne sait pas qu’il ne sait pas s’il est ou non (ou : parce qu’il n’est pas conscient de savoir s’il peut être ou ne pas être). Il ne peut pas se vider lui-même pour dormir parce qu’il n’est pas ce qu’il est et il est ce qu’il n’est pas ».
* Voilà, Darl se prend la tête, sur lui-même et sur le frère qu’il jalouse, qui lui ne peut pas se prendre la tête puisqu’il est con, mais Darl a bien compris que Jewel ne correspondait pas à l’image qu’il donnait. Jewel est un mythe.

« My mother is a fish », (Vardaman, le plus jeune des enfants) p.76. Chapitre le plus court.

« I cannot love my mother because I have no mother. Jewel’s mother is a horse. » (Darl), p.86

« Nowhere in this sinful world can a honest, hard-working man profit. It takes them that runs the stores in the towns, doing no sweating, living off of them that sweats. It ain’t the hard-working man, the farmer. » (Anse), p.98
* Rien n’a changé.

« But they (women) make life hard on them not taking it as it comes up, like a man does » (Samson), p.105.
* Tout à fait vrai.

« You mean, the safe things are not always the best things ? (…) When something is new and hard and bright, there ought to be something a little better for it than just being safe, since the safe things are just the things that folks have been doing so long they have worn the edges off and there’s nothing to the doing of them that leaves a man to say, That was not done before and it cannot be done again. », (Darl et c’est Cash qui lui parle) p.118
* Ma philosophie, et je la paye super chère ma philosophie de vie…

« Because a fellow can see ever now and then that children have more sense than him. But he don’t like to admit it to them until they have beards. After they have a beard, they are too busy because they don’t know if they’ll ever quite make it back to where they were in sense before they was haired, so you don’t mind admitting then to folks are worrying about the same thing that ain’t worth the worry that you are yourself » (Tull à Vardaman), p.126-127
*Parfaite citation pour mon poème « Une barbe ». Parfaite, même si je comprends rien à la fin.

« I could just remember how my father used to say that the reason for living was to get ready to stay dead a long time », (Addie), p.157
* J’adore !!! C’est trop drôle. Impossible que Bukowski l’ait pas lu, il répète toujours la même chose, mais bon, c’est vrai que c’est quasiment une vérité générale, un peu pessimiste quoi.

« He had a word, too. Love, he called it. But I had been used to words for a long time. I knew that that word was like the others : just a shape to fill a lack ; that when the right time came you wouldn’t need a word for that any more than for pride or fear. » (Addie), p.160
* Magnifique : « just a shape to fill a lack », ma-gni-fique !

« (…) and that sin and love and fear are just sounds that people who never sinned nor loved nor feared have for what they never had and cannot have until they forget the words. » (Addie), p.162
« And then, life wasn’t made to be easy on folks : they wouldn’t ever have any reason to be good and die », (Moseley) p.191

« I don’t know if a little music ain’t about the nicest thing a fellow can have » (Cash), p.245
* Si, avec un bon livre et un bon plat et un bon amant. C’est pour ça que malgré ma résistance engagée, je craque finalement pour l’IPOD, parce que j’aime la musique et que je pense que j’en écoute pas assez. Mais j’aimerais le faire en courant. Du coup, j’envisage les super chaussures de sport, donc encore de la consommation…


Lexique :
Durn : Ce mot apparaît souvent. Je suppose qu’il veut dire « damned », mais je n’en suis pas sûre. Ah, c’est bon, j’ai la confirmation avec Open dictionnary en ligne, ça veut bien dire « damned ».
Bereavement : deuil, chagrin.
Racking : ? (métaphore filée avec la machine)
Tenement : immeuble ancien.

dimanche 14 novembre 2010

DISQUES DEMAQUILLANTS EN COTON EQUITABLE MAX HAVELAAR

Pour l'hygiène quotidienne, le démaquillage quotidien, dorénavant ce sera avec du coton équitable Max Havelaar, vendu tant à Casino qu'à Monoprix :
Moi j'ai acheté les 40 disques ovales, plus chers.
Mais les 60 ronds coûtent 1,30 euro.

Le café et le coton sont deux exemples de produits dont le monde Occidental ne pourrait se passer et qui proviennent tous deux de pays pauvres que nous exploitons allégrement à notre guise avec la complicité de leurs dirigeants corrompus gros et gras.
Ayons la décence de payer plus cher, plus justement les producteurs de ces pays pauvres, même si la marge de Max Havelaar est sans doute la même que les autres industriels.

Le paquet de disques de coton Demak'Up pour peaux sensibles qui me reste, ce sera pour le démaquillage exceptionnel de maquillage exceptionnel (me maquille très peu). Un paquet devrait suffire pour toute l'année.

"C'est comme ça et me faites pas chier" de Rodrigo Garcia, 13/11/10 Théâtre de Gennevilliers (92).


C’est comme ça et me faites pas chier : une pièce d’ex-concepteur rédacteur publicitaire faite et adaptée POUR les bourgeois, bravo Rodrigo Garcia !
Théâtre de Gennevilliers (Métro Gabriel Péri, ligne 13).  
Samedi 13 novembre 2010, 20h30.
Texte et mise en scène : Rodrigo Garcia.
Acteurs : une femme, un homme, un autre homme (musicien).
*Nul à chier. **Pour le texte.

CRITIQUE :
Comme d’habitude, oui, j’aime certaines phrases de Rodrigo Garcia (dont je suis une fan parisienne de la première heure, enfin depuis le Boucher espagnol), mais sa mise en scène je la trouve nulle à chier (sauf celle du Boucher espagnol, justement).
Explications :

C'est une pièce écrite pour les bourgeois, mais les bourgeois du début du siècle dernier, ça me paraît évident, clair et net.
1)       Il rappelle dans la notice de la pièce que son public est soit professionnel, amateur d’art ou bourgeois et que c’est un public de merde, ok mais…
Réponse à Rodrigo Garcia : Oui mais Rodrigo, cesse de ne travailler que pour ce public là, merde ! Cesse d’utiliser tous les ressorts « shoking » les plus faciles, les plus gratuits, les plus nuls pour scandaliser le bon goût de l’amateur d’art et la morale du bourgeois ! Tu te plains d’un public que tu privilégies puisque tu ADAPTES ta mise en scène à lui !!! Ouh ! Ouh !
Exemples : des scènes pornographiques d’accord, mais pourquoi ? le rapport avec le texte ? une femme nue d’accord, la mise en scène de la femme nue, très joli, d’accord, mais pourquoi ? le rapport avec le propos du texte ? Des crabes d’accord, mais pourquoi ? Des mises en scène de légumes parfaitement exécutées d’accord, mais pourquoi ? Tout est techniquement bien fait, mais tout est GRATUIT et moi j’aime PAS la gratuité, j’aime le nécessaire.

2)       L’ennui profond en découle et dû aussi à la sempiternelle méthode Rodrigo Garcia pour mettre en scène ses textes :
Il alterne systématiquement performances scéniques brutales qui n’ont rien à voir avec le texte (mais quand ça arrive et ça arrive, ça nous rend heureux), donc la plupart du temps gratuites et récit mou de son texte prononcé sur un ton monotone, sur un fond de musique monotone, tout monotone…
Quelquefois, l’acteur monotone pète un câble et s’excite soudainement (ce qui est arrivé ce soir par exemple). Mais qu’est-ce qu’on s’ennuie bordel, qu’est-ce qu’on s’ennuie !
Rodrigo Garcia dit dans la notice que puisque son texte est morbide, il faut bien rendre vivante la mise en scène.
En pratique ça donne : pendant qu’un acteur parle d’art sur un ton monocorde et monotone et dit sans doute des choses très profondes et intéressantes (pour avoir lu Rodrigo Garcia, je sais que cet auteur me touche, à défaut du metteur en scène) eh bien une femme (à poil ou non) s’excite à côté. Voilà, c’est du Rodrigo Garcia et à peu près toute la production contemporaine théâtrale…(déjà vu mille fois au Théâtre de la Colline, des pièces dont je n’ai jamais rien retenu, ni le titre, ni le contenu, ni rien, or Môsieur Garcia parle de « réinventer le théâtre », ah ! La bonne blague prétentieuse !).

Réponse : D’accord Rodrigo, mais pas en alternant les deux, bordel ! Pas en alternant vie/morbidité ; pas en alternant dynamisme/lenteur , pas comme ça, parce que ça fait chier le spectateur bordel !

3)       Rodrigo Garcia n’a pas joué sur scène à mon plus grand regret, moi qui m…ma petite culotte rien que de songer à son arrivée sur scène. Je le trouve beau Rodrigo Garcia, et je suis triste qu’il n’ait pas joué dans cette pièce.

Conclusion : Hier encore, je regardais la formation du CELSA en songeant à ma reconversion future et je me voyais déjà postuler à l’option « Communication publicitaire ». Mais depuis que je sais que Rodrigo Garcia est un ancien concepteur-rédacteur publicitaire (métier que j’ai déjà par ailleurs exercé  pour avoir hésité entre celui-ci et le mien) et qu’il fait des mises en scène pareilles, aussi gratuitement faciles, qui ressemblent davantage à des slogans publicitaires (oui parfaitement, des slogans) pour mettre en vitrine de façon désavantageuse, vulgaire et grotesque la profondeur et parfois le sublime de ses pensées, je me dis que non, je fais peut-être fausse route…parce que Rodrigo Garcia est un véritable artiste pour moi, mais il fait de la déformation professionnelle sur scène. Merci Rodrigo de me faire douter comme ça, pff.

Ah si ! un truc positif : cette pièce m’a donné envie d’apprendre à jouer de la batterie l’année prochaine !







samedi 13 novembre 2010

ソラニン SOLANINE de Takahiro Miki à partir du manga d'Inio Asano, 2010 (JAPON)


SOLANINE
Sortie : 3 avril 2010.

( JP ) Réalisateur : Takahiro Miki
Auteur du manga éponyme : Inio Asano
Durée : 02:06:00

****Emouvant. Ce n’est pas un film culte, ce n'est pas un chef d’œuvre esthétique mais c'est une histoire émouvante aux problématiques universelles (à mon sens) et très bien jouée, qui m'a fait pleurer pendant pratiquement deux heures.
Je ne comprends pas pourquoi on parle de jeunesse typiquement japonaise paumée à cause de la crise économique alors que ce que je viens de voir, je le vis à l’intérieur de ma propre chair et que je pense que c’est largement international.


L’histoire : Deux jeunes adultes ayant achevé leurs études universitaires vivent ensemble. Ils ne sont pas épanouis dans leur métier, purement alimentaire. Meiko (la fille) démissionne et cela déstabilise le couple, mais bientôt c’est Tanada (le garçon) qui démissionne à son tour.
Meiko n’a pas de passion dans la vie et lorsqu’elle démissionne, elle se met à jouer à la console de jeux toute la journée ou à faire du shopping.
Tanada, lui a une passion : la musique (le rock, yeah !) et encouragé par Meiko, il se met à achever un album de musique avec son groupe. Aussitôt l’enregistrement fini, ils envoient leur démo à toutes les grandes maisons de disques. Une grande maison leur répond, mais…
Je n’en dirai pas plus. Tout ce que je peux dire, c’est que ce film est vraiment touchant par son réalisme et incite à une vraie réflexion sur le sens de la vie et sur la place que l’on occupe sur Terre, une fois les études terminées... 



N.B. La solanine est une substance toxique de la pomme-de-terre. C'est le titre de la chanson la plus travaillée de Tanada dont j'ai mis les paroles à la fin.

Contexte : C’est le film qui a lancé le cycle « Rendez-vous avec le Japon » (tous les 2èmes samedis du mois) à la Pagode en ce samedi 13 novembre 2010, à 10h30. 

Il avait déjà été présenté une première fois lors du festival Paris-Cinéma mais n’a jamais été distribué en France dans toutes les salles, je ne sais pas pourquoi. Le manga s’est vendu à 500.000 exemplaires ce qui représente une faible vente (crise du Manga au Japon, les ventes baissent depuis la crise), mais le film a été placé en sixième position et le DVD dans les premières.
Sortie : 3 avril 2010. 



( JP ) Acteur : Yoichi Kondo
( JP ) Actrice : Aoi Miyazaki
( JP ) Actrice : Jun Miho
( JP ) Actrice : Miyako Yamaguchi
( JP ) Acteur : Kenta Kiritani
( JP ) Actrice : Ayumi Ito
( JP ) Studio : Asmik Ace Entertainment

Lyrics de la chanson Solanin :
English, Kanji, romaji

Solanin
Translation by Sato

Mistaken thoughts from beyond the sky
A life spent saying goodbye?
The little piece of the future I saw
Was waving goodbye

The small room I once lived in
Is now occupied by someone else
The horrible things I said to you
The days that were wasted

Perhaps if I'd taken that chance, if I could go back to that day
But I'll never be that person again

Even if that frail happiness
had somehow lingered on
A bad seed would surely have sprouted
So I guess this is goodbye

The cold cans of coffee from freezing winters
That long rainbow coloured scarf
I stroll through the back alley
It all comes back to me

Even if that frail happiness
had somehow lingered on
A bad seed would surely have sprouted
So I guess this is goodbye

I guess

Goodbye, that's enough
You can cope anywhere
Goodbye, I'll manage somehow too
Goodbye, that's what I'll do



ソラニン
Lyrics by Inio Asano

思い違いは空のかなた
さよならだけの人生か
ほんの少しの未来は見えたのに
さよならなんだ

昔住んでた小さな部屋は
今は他人が住んでんだ
君に言われたひどい言葉も
無駄な気がした毎日も

あの時こうしていれば あの日に戻れれば
あの頃の僕にはもう 戻れないよ

たとえばゆるい幸せが
だらっと続いたとする
きっと悪い種が芽を出して
もうさよならなんだ

寒い冬の冷えた缶コーヒーと
虹色の長いマフラーと
小走りで路地裏を抜けて
思い出してみる

たとえばゆるい幸せが
だらっと続いたとする
きっと悪い種が芽を出して
もうさよならなんだ

なんだ

さよなら それもいいさ
どこかで元気でやれよ
さよなら 僕もどーにかやるさ
さよなら そうするよ


Solanin
Romaji by Sato

omoi chigai wa
sora no kanata
sayonara dake no jinsei ka
hon no sukoshi no mirai wa mieta no ni
sayonara nanda

mukashi sundeta chiisa na heya wa
ima wa dareka ga sunden da
kimi ni iwareta hidoi kotoba mo
muda na ki ga shita mainichi mo

ano toki koushite ireba, ano hi ni modorereba
ano koro no boku ni wa mou, modorenai yo

tatoeba yurui shiawase ga
daratto tsuzuita to suru
kitto warui tane ga me wo dashite
mou sayonara nanda

samui fuyu no hieta kan koohii to
niji iro no nagai mafuraa to
kobashiri de rojiura wo nukete
omoidashite miru

tatoeba yurui shiawase ga
daratto tsuzuita to suru
kitto warui tane ga me wo dashite
mou sayonara nanda

nanda

sayonara, sore mo ii sa
doko ka de genki de yare yo
sayonara, boku mo doo ni ka yaru sa
sayonara, sou suru yo


PS : J'ai foncé à Paris Store après acheter de la sauce au curry japonaise, deux hauts de cuisse et j'avais déjà préparé des pommes-de-terre et des carottes bouillies la veille, avec du riz, de la ciboulette séchée et de l'arôme Maggi, et voilà, c'était bon et ça m'a consolée.









Musique :

http://www.torrents.net/torrent/449102/Asian-Kung-Fu-Generation---Magic-Disc/