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mardi 17 août 2010

HAPPY TOGETHER (Cheun gwong tsa sit), de Wong Kar-Waï (CHINE), 1997.



 
******Chef d’œuvre.

Happy Together (1997), c’est mieux que Le Secret de Brokeback Mountain (2004), mais suis-je encore objective lorsqu’il s’agit de Wong Kar-Waï ?

J’y trouve tout ce que j’aime pour ne pas me répéter : des gens qui s’aiment, qui baisent, qui sont heureux ensemble ; malheureux ensemble et…qui fument toujours beaucoup. J’aimerais bien que quelqu’un soit assez fou pour compter les cigarettes filmées pour chaque film de Wong Kar-Waï. Est-ce que c’est lui ou les acteurs ? Et son acteur fétiche ? Tony Leung, dont je suis fan aussi ?

Bref, l’histoire : deux Chinois…en Argentine. Moi je me dis : « Putain, ils parlent super bien espagnol ces Chinois ! »…En fait, j’avais oublié de mettre le film en VO, lol, la blonde quoi.

Bref : deux Chinois en Argentine. Le film commence par une scène de cul en noir et blanc (qui indique que c’est un flashback) entre les deux protagonistes qui se connaissent donc déjà. J’ai déjà craqué pour Tony Leung (Lai Yiu-fai dit Faï) rien qu’en regardant sa tête, les expressions de son visage qui sont belles, très belles.

Après on fait un saut dans le temps et on les voit se prendre la tête à chercher Iguazu en voiture, qu’ils ne trouvent pas. Ils finissent par rentrer, crevant de froid, épuisés.
Puis on passe au présent : Fai, le héros de l’histoire bosse comme rabatteur d’un spectacle de tango argentin pour touristes chinois. Il n’aime pas son travail, qu’on devine mal payé. Il fixe un autre homme, son amant du début, qui l’ignore et qui s’en va avec un occidental dans une belle voiture. Il s’agit de Po-wing, qui se prostitue. Tous les deux jouent au chat et à la souris. Ils s’aiment, ils se chamaillent, « Volvemos a empezar » (oui moi je lisais les sous-titres en espagnol) dit souvent Po-Wing, « On va recommencer ».

C’est Po-wing qui revient vers Fai, c’est lui qui l’allume, mais le plus amoureux n’est pas celui qu’on pense. Le plus amoureux des deux, c’est celui qui passe son temps à rejeter ses avances sexuelles, mais c’est aussi celui qui ne cesse de se plier en quatre pour faire la bouffe à Po-wing lorsqu’il est blessé et malade, le recueille chez lui, le lave scrupuleusement, le borde quand il dort... Rien que d’y penser, j’en ai encore les larmes aux yeux, tellement c’est beau, cette complexité humaine qui fait que ce n’est pas celui qui s’agite le plus, qui parle le plus, qui aime le plus dans une relation…Et c'est ça qu'a voulu montrer Wong Kar-Wai, ce sont tous ces petits gestes, ces actes d'amour silencieux.


Bref, on l’aura compris : Fai, c’est un peu le représentant masculine du couple : viril, silencieux, réservé mais attentionné par des actes et non des paroles et Po-wing, c’est le représentant féminin : bavard ; extraverti ; allumeur ; séducteur ; pas efféminé mais très minet, très content de son image, aimant se peigner, se regarder dans la glace. Il adore faire tourner en bourrique Fai, le rendre dingue et il y arrive parfaitement. Toutefois il apprend tout de même à Fai à danser le tango, et ça, c’est un des moments les plus heureux entre les deux parce que Fai se lâche et n’hésite pas à embrasser fougueusement Po-Wing.



Mais un jour leur relation se gâte, parce que Fai, jaloux, ne supporte pas Po-Wing sorte depuis qu’il est rétabli : il sait très bien que celui-ci va faire le tapin et donc, va voir d’autres hommes, allant jusqu’à lui offrir plusieurs cartouches de cigarettes afin que celui-ci n’ait plus besoin de sortir pour en acheter. Donc Po-Wing, qui se sent séquestré à la maison, pète un câble, décide de s’en aller, de retrouver sa liberté. Il cherche juste son passeport. Mais Fai, dès le premier soir où il a accueilli Po-Wing blessé chez lui, en lavant les vêtements de ce dernier, a pris son passeport : il ne veut pas que Po-Wing retourne en Chine sans lui.

Et là, commence l’enfer de Fai qui va souffrir sa race d’avoir perdu l’homme qu’il aime. Et c’est dur, et c’est beau à voir en même temps, parce que de même que Fai aime sans parler, il souffre aussi sans en parler.  Chang, un cuisinier qui travaille avec Fai (qui a quitté son premier boulot), va assister aux deux périodes : la période heureuse et la période malheureuse, rien qu’en écoutant Fai sans cesse pendu au téléphone. Il est un peu amoureux de Fai, mais bon, il est surtout en manque d’ami. Il a des problèmes de vue, donc s’attache à la voix des gens et n’aime pas les voix aigues. Il aime la voix de Fai. Il réussit à devenir son ami, compagnon de beuverie en tout cas, mais rien n’y fait, Fai a toujours aussi mal et n’est pas vraiment réceptif au besoin d’amitié de Chang, qui est tout seul à Buenos Aires et ne connaît personne. Il partira aussi à Ushuaia tout seul, c’est trop triste, il fait mal au cœur ce petit Chang.

Finalement, Fai quitte son logement, son deuxième travail et se reconvertit dans la boucherie. C’est Po-Wing qui reprend son logement en apprenant que Fai est parti. Fai va voir Iguazu tout seul avant de repartir à Hong-Kong et se sent triste parce qu’il pense bien sûr à Po-Wing, au fait qu’« ils auraient dû y être ensemble », en faisant un stop à Taïwan avant (pays de Chang) mais sans le voir car il n’est pas là.

Ce film est trop beau (peut-être moins beau esthétiquement que « 2046 » et « In the Mood for Love » hélas, Christopher Doyle étant le directeur de photographie des trois films mais il a dû s’améliorer pour les deux autres qui sont venus après celui-ci ; notons également que la musique est bien choisie -notamment les tangos argentins- mais ne sont PAS DU TOUT mis en valeur comme dans les deux autres films d'après).

Ce film est beau parce qu’il montre, comme sait si bien le faire Wong Kar-Wai, ces moments incroyables que nous passons à aimer et à nous rendre dingues pour des êtres humains qui traversent nos vies et que nous ne reverrons PLUS JAMAIS.  Les moments où on les aime et où ces êtres humains-là nous aiment sont les plus beaux moments de l’existence.

Et en effet, la mise en lumière de Fai se démenant par amour pour Po-Wing quand il est malade, par de SIMPLES gestes, est belle à voir. Et quand il souffre, quand tout cela est fini, on souffre aussi. Ce que j’adore dans ce film, c’est que ce n’est pas un film sur l’homosexualité, c’est un film sur l’Amour. L’Amour éphémère, celui qui se vit intensément et ne dure jamais. Celui qui rend le plus heureux et le plus malheureux lorsque la magie se finit.

RÉCOMPENSES :

•    Prix du meilleur réalisateur au Festival de Cannes 1997.
•    Prix de la meilleure photographie (Christopher Doyle), lors du Golden Horse Film Festival 1997.
•    Prix du meilleur film étranger, lors de l'Arizona International Film Festival 1998.
•    Prix du meilleur acteur (Tony Leung Chiu-wai), lors des Hong Kong Film Awards 1998.
•    Prix du film du mérite, lors des Hong Kong Film Critics Society Awards 1998.