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samedi 4 décembre 2010

The United Red Army, Koji Wakamatsu, 2008 (JPN).



United Red Army, Koji Wakamatsu, 2008 (JPN).

Quand la révolution devient tyrannie…

****Important.
Mais attention, il vaut mieux être disposé à voir ce genre de film qui dure 3 heures (ou moins ou plus, mais à peu près) qui déprime beaucoup, au final.

Histoire : Le prologue du film nous prévient : « Tous les faits sont vrais, mais il y a de la fiction ».
Bref, c’est un docu-fiction sur un groupe japonais révolutionnaire et terroriste, l’United Red Army, né à la fin des années 60 (69-70) à l’issue de nombreux combats étudiants contre la guerre du Vietnam, contre l’impérialisme américain, contre la capitalisme, et pour le soutien aux prolétaires du monde entier, pour le soutien à la cause de Martin Luther King, pour la révolution culturelle maoïste communiste.
On ne pourra plus dire après ce film, que le Japon est un peuple « bizarre », « xénophobe », « machiste », « débile et taré » comme je peux l’entendre bien souvent à leur égard : il ne l’est pas plus qu’un autre pour bien des reproches qui lui sont faits (regardons de plus près ne serait-ce que la France profonde et l’Amérique profonde : en quoi sommes-nous tellement différents ?).
Quant à l’esprit critique, l’esprit de révolte, il n’est pas l’apanage des pays occidentaux : le Japon a eu, lui aussi, ses universitaires révoltés, ses intellectuels pensants, ses rêves d’un monde meilleur et ses combats idéologiques, politiques et physiques.
S’il y a bien un film qui montre l’universalité de ce pays toujours montré de façon particulière, c’est bien lui.
C’est une image du Japon inédite que nous n’avons pas l’habitude de voir en Occident, dont nous n’avons pas connaissance. C’est un documentaire-fiction exceptionnel qui témoigne de cette partie de l’Histoire du Japon.
Ce film nous rappelle qu’il y a toujours eu deux voies dans toute révolution : l’une, consensuelle donc pacifiste et l’autre, radicale donc armée et violente.
Ce film nous montre hélas qu’à l’instar de nombreux autres pays communistes, les petits chefs révolutionnaires sympathiques des débuts sont devenus bien vite de grands tortionnaires idéologiques sanglants, dénués d’humanité.
Ainsi, le film commence comme un véritable hommage historique à tous ces jeunes étudiants japonais qui se sont emparés de problèmes mondiaux, et monte crescendo vers l’horreur, de plus en plus inhumaine de la torture psychologique et physique effectuée sur les militants même, les conduisant fatalement à la mort de façon atroce, parce qu’ils n’ont pas su être « de bons militants ».
Le leitmotiv des deux chefs de factions du film : « l’auto-critique », dont le mode d’emploi n’est pas bien compris par certains militants. « S’auto-critiquer » consiste à analyser sa part de responsabilité dans les échecs des combats révolutionnaires précédents et s’auto-flageller tant moralement que physiquement pendant des heures.
Ainsi, pour « aider » un camarade qui ne parvient pas à  « s’auto-critiquer », tout le groupe doit le frapper chacun son tour… « S’auto-critiquer » consiste en réalité à se remettre en question personnellement à l’infini mais jamais à remettre en question les supérieurs hiérarchiques des factions et le radicalisme de leurs idées.
Voir de telles horreurs commises au nom de telles absurdités est difficile.
Par exemple : la chef de faction critique une militante qui se maquille alors qu’ils suivent tous un entraînement militaire intensif dans les montagnes.
La critique est tout à fait justifiée : combien de fois n’ai-je pas compris ces filles obnubilées par leur apparence physique de façon ridicule au milieu de la nature, d’une nature déjà assez grandiose pour qu’on n’éprouve pas le besoin de se farder ? Où la séduction devient une activité inutile ?
Mais quand on voit les conséquences terribles de cette « petite chose », on a qu’une seule envie : se maquiller, se faire belle, être superficielle et revendiquer le droit pour toutes les femmes d’être connes et superficielles. Parce que ce qui importe, ce n’est pas d’être ridicule ou pas, ce qui compte, c’est d’être LIBRE d’être ridicule ou de ne pas l’être et de ne pas être obligée d’être torturée psychologiquement à cause de cela et d’en mourir complètement tuméfiée et humiliée dans sa chair et dans son âme. Tout ça pour une histoire de maquillage…

L’actrice qui joue la femme humiliée est par ailleurs phénoménale : elle joue le rôle d’une nunuche qu’on a envie de gifler toutes les secondes parce qu’elle est laide et bête et bien sûr, elle n’a pas eu une vie facile.
Ce n’est pas une militante intellectuelle, mais une âme perdue qui avait besoin d’une cause pour exister : voilà son plus grand tort. Non, son plus grand tort c’est d’avoir dit : « Je veux vivre » (en gros : je dirai tout ce que vous voudrez, mais je veux vivre, ne me tuez pas) : on lui reproche alors de vouloir vivre individuellement, au lieu de vouloir sacrifier sa vie à une cause collective… Elle a encore fait une boulette monumentale, elle n’a rien compris.



Le film montre alors un par un, tous ces militants de la première heure qui ont pourtant donné toute leur âme et tout leur corps au parti communiste, aux factions, au groupe, récompensés en étant cruellement accablés, frappés et tués.

L’United Red Army sera de toute façon décimée. Un des chefs de faction s’est suicidé et l’autre, la femme, est condamnée à mort, elle est encore en prison.

La deuxième partie du film est une longueur immense inutile (au moins une heure) qui se focalise sur les « survivants » du groupe, qui de toute façon finiront par être attrapés par les autorités à leur tour…Mais Wakamatsu a voulu filmer cette histoire vraie, alors il nous l’a montrée. Tout n’est pas inutile : il montre bien les « jeunes terroristes » qui expliquent à la civile retenue dans sa maison le mode d’emploi manipulateur de la police pour que l’opinion publique soit contre eux, en faisant pleurer dans les chaumières. Malheureusement, ils tuent aussi un civil volontairement, et ça ne fait pas d’eux des héros non plus.


Ah oui : pour tous ceux qui sont habitués à décrire le cinéma de Wakamatsu comme « érotique » (pinku), vous allez être étonnés de n’y voir AUCUNE SCENE SEXUELLE. Juste une femme nue couchée sur le ventre et ça dure moins d’une seconde. Enfin vous allez peut-être comprendre que Wakamatsu, ce n’est pas que « ça ».
Voilà, après ce film, on est triste (et on veut sortir et se maquiller superficiellement). On pense au Livre de Manuel de Cortazar et on se dit que personnellement, on sait pourquoi on n’appartient à aucun groupe militant. Qui dit groupe militant, dit chef, qui dit chef, dit con. Un petit troupeau qui veut lutter contre les gros troupeaux qui dirigent ce monde pourri, n’en reste pas moins un troupeau, et nous, ben, on estime qu’on ne sera jamais un mouton qui suivra un quelconque troupeau. On est un mouton noir et on restera un mouton noir : seul, sans autre idée que la liberté individuelle pour tous.

sur lequel vous trouverez l'histoire de l'Armée rouge japonaise :

Rien à voir : On craque pour le bel acteur Go Jibiki (qui joue le très méchant et bête chef de faction et on se serait fait buter si on l'avait avoué parce qu'une militante enceinte avoue qu'elle trouve qu'il a de beaux yeux et c'est un crime de trouver mignon le chef, merde...).

On le veut pour Noël dans son lit. Il est né en 1976, en plus.
Son site :