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vendredi 17 septembre 2010

Fallen angels, les Anges déchus (Duòluò Tiānshǐ), 1995, Wong Kar Waï (HONG-KONG)

Fallen angels, les Anges déchus (Duòluò Tiānshǐ) , 1995, Wong Kar Waï (HONG-KONG)
*** Film intéressant, émouvant.



Un Ange déchu, c’est selon la tradition chrétienne, un ange qui a été banni ou exilé du paradis. Dans ce film, nous avons cinq anges déchus.
Le héros, la trentaine, est un meurtrier à gages qui travaille avec une femme, sa partenaire en affaires : elle lui fournit les contrats, il n’a plus qu’à tuer.
Mais après une blessure, il décide d’arrêter, de se ranger, de devenir un honnête homme.

Le deuxième ange déchu, c’est sa partenaire, la trentaine : elle est amoureuse de lui et à chaque fois elle se fait très belle, va dans le bar qu’il fréquente, s’assied à la même place et rentre en se masturbant en pensant à lui. A la fin, elle pleure parfois. C’est vraiment émouvant parce que je me demande combien de femmes pourtant magnifiques, pourtant sublimes, sont seules et font ça en pensant à l’homme qu’elles aiment. Moi en tout cas je remercie Wong Kar Waï de tout mon cœur d’avoir montré ça, parce que souvent je me suis dit que ça ne devait pas arriver aux femmes vraiment belles, mais si, ça leur arrive aussi, en tout cas dans ce film et l’actrice est sublime.

Le troisième ange déchu, c’est un muet qui n’a pas encore trente ans : il a perdu sa mère tuée dans un accident (un camion de crème glacée) et c’est son père qui l’a élevé. Il ne parlerait plus depuis qu’il a mangé une boîte d’ananas (un truc comme ça). Il ne fait que des conneries : il force la fermeture de magasins et force des clients dans la rue à acheter de la marchandise ou à lui donner de l’argent. Il n’a pas de travail. Il tombe amoureux pour la première fois d’une fille mais elle n’en a rien à faire de lui. Il n’a rien dans sa vie, il est vide.

Le quatrième ange déchu, c’est une fille pas belle, presque laide. Elle s’est teinte en blonde pour se relooker mais elle n’est toujours pas jolie. Elle est un peu hystérique, pour se faire remarquer, attirer l’attention, elle est insupportable avec ses cris aigus. Elle fait pitié. Elle fait vraiment pitié. C’est pourtant elle qui réussit à coucher avec le meurtrier, le héros, dont rêve la femme sublime qui ne l’a pas. La vie est mal foutue, dégueulasse. Parce que le meurtrier ne l’aime pas, il s’en fout, il la baise juste parce qu’elle n’a aucun enjeu possible dans sa vie. C’est terrible d’être dans la position, dans  le rôle de cette fille, et ça aussi je me demande si je ne suis pas en train de le vivre, en moins moche, heureusement, parce que c’est trop pathétique et dévalorisant. Mais c’est ça qui est fort : la moche dont on a pitié, ELLE, elle couche avec le meurtrier tant convoité par la fille belle, la femme fatale qui rêverait tant de le faire avec lui. Et donc c’est ça aussi que je me dis pour me consoler : si la personne qu’on aime ne nous aime pas, on a au moins la consolation de lui faire l’amour malgré tout et ça, c’est un privilège, un cadeau immense, qui rend en dépit de toute dévalorisation, heureux.

Le cinquième ange déchu, c’est une fille qui vient de se faire larguer par son mec pour une copine qu’elle lui a présenté : il lui annonce leurs fiançailles. Elle souffre, elle souffre beaucoup. Elle rencontre le muet sur son chemin qui tombe amoureux d’elle, mais elle, elle n’en a rien à faire. Elle se sert de lui pendant un temps pour pleurer sur son épaule, puis l’abandonne. J’adore la scène où elle explique qu’elle est venue à un match uniquement parce qu’elle pensait qu’il viendrait et qu’elle s’agitait exprès pour qu’au cas où il la verrait, il la voit avec un autre. On a tous fait ça. Elle retrouvera l’amour plus tard et ne se souviendra même pas de lui. C’est l’ange le moins déchu de tous parce qu’elle s’en sortira.

Le meurtrier est le premier ange déchu parce qu’en annonçant à sa partenaire qu’ils ne travailleront plus ensemble, il provoque en elle la volonté de se venger. Elle lui demande d’accepter un dernier contrat exprès pour qu’il se fasse tuer. Il meurt. Il n’aura pas pu se ranger, devenir meilleur. Ce qui est horrible c’est qu’il ne lui a pas dit qu’il ne voulait pas devenir un homme meilleur, un homme bon, il a juste dit qu’il ne travaillerait plus avec elle, et forcément ça met en colère n’importe quelle femme amoureuse, ce type de déclaration. Ah les hommes…problème de communication.

Un film intéressant qui n’est pas un chef d’œuvre mais qui contient des scènes très belles, très émouvantes, très fortes : la scène où la femme fatale pleure après son rituel de masturbation ; la scène où l’hystérique reproche au meurtrier de l’avoir raccompagnée (quel connard, tous les mêmes : ils veulent être gentils et font six cents fois plus mal !) ; les scènes où le fils muet film son père, où le père regarde seul la vidéo, où le fils regarde la vidéo après sa mort.

  • Leon Lai : Wong Chi-Ming, le tueur (pas spécialement beau, Tony Leung aurait été mieux peut-être).
  • Takeshi Kaneshiro : He Zhiwu, le muet (le même qui joue le jeune flic dans Chungking Express)
  • Michelle Reis : la belle asiatique élancée aux cheveux raides et lisses et à la frange super sexy, la femme fatale.
  • Charlie Yeung : Charlie / Cherry, le cœur brisé.
  • Karen Mok : Punkie / Blondie / Baby, la moche avec qui on couche et dont on tombe pas amoureux.