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lundi 9 août 2010

LE TEMPS DES GITANS, (en serbo-croate Дом за вешање (Dom za vešanje)), d'Emir KUSTURICA, 1989 (YOUGOSLAVIE)


 Le Temps des Gitans, d’Emir Kusturica, 1989.
****Très bon film.

« Le Temps des Gitans », c’est un film que j’ai voulu voir en espérant de tout mon cœur avoir une image différente et meilleure des Gitans* ; hélas, mille fois hélas, ce film confirme ces nombreux préjugés établis : vols en tous genres ; exploitation d’enfants mendiants faisant semblant d’être infirmes ; trafic d’enfants en vue d’adoption, etc. Et tout cela au moyen de promesses en l’air ; de mensonges ; sournoiserie ; mesquinerie, etc. Voilà les trois-quarts du film, avec pour héros, Perhan, un jeune homme né honnête, gentil et bon à la base, mais sans aucune éducation (hormis musicale…) et doté d’un don hors du commun : il peut déplacer les objets par son esprit.

Sa grand-mère aurait voulu qu’il gagne sa vie de façon honnête, mais comment peut-elle bien espérer cela sachant qu’elle ne l’encourage à faire aucune formation professionnelle ? Pas une seule fois, le mot « école » n’est évoqué dans ce film ! La notion d’éducation, de formation, de diplômes, ne fait pas partie du monde tzigane, en tout cas dans ce film.

C’est pour ça qu’en toute logique, aussi bon soit-il, Perhan se retrouve coincé à devenir malhonnête et sa grand-mère est d’une hypocrisie incroyable quand elle pleure en voyant ce qu’il est devenu : comment ne pouvait-elle pas deviner, comme l’aura déjà anticipé naturellement le spectateur, que celui-ci allait mal tourner en le confiant à un gitan qui vient de dépouiller son propre fils et qu’elle le savait très bien ?

Elle le fait parce qu’elle n’a plus rien et qu’elle est vieille : nous le comprenons très bien ; mais pourquoi ce déni de sa propre responsabilité dans ce qu’est devenu son petit-fils ? Elle lui dit d’utiliser sa tête, mais elle ne lui dit pas vraiment comment. La seule profession qu’on lui connaît est la guérison par la magie (ou la sorcellerie).
Perhan aurait pu se servir de son don magique pour gagner sa vie honnêtement : dans un cirque, dans la rue, que sais-je ?

Il est né d’un soldat slovène de passage qui a juste baisé sa mère et n’a jamais plus donné de nouvelles (un connard de plus sur terre) abandonnant sa mère et lui, décédée à la naissance de sa sœur ; lui-même devient père d’un enfant qui n’est pas le sien mais celui de son beau-père, le père de sa demi-sœur… ; lui-même perd la femme qu’il aime suite à la naissance d’un enfant qui n’est pas le sien… ; lui-même abandonne sa sœur, puis son propre fils, au lieu de comprendre ses priorités, avant de mourir lui-même…

Ce film est très triste et laisse un goût amer. Parce qu’on s’attache beaucoup à Perhan qui est si naïf, si bon, un si gentil garçon perdu et qui aura vraiment eu une vie de merde du début à la fin, en ayant cru sincèrement à la bonté d’un père protecteur (finalement totalement idéalisé), Ahmed, qui aura fait de lieu un bon voyou.

Au niveau stylistique, ce film est plein de fantaisie, d’imagination, de mouvements, qui en font un film atypique dans le paysage cinématographique et original, à voir, surtout les rêves ou les cauchemars de Perhan.

La plus belle scène du film est sans conteste la scène imaginée par Perhan dans le Gange au milieu des Indiens (qui en a fait l’affiche du film), elle est d’une beauté incroyable sur fond d’allusion métaphorique au Styx et au mythe d’Orphée et Eurydice (Hadès lui avait dit que s’il voulait la revoir vivante, il ne devait pas la regarder, mais il l’a fait et elle meurt une deuxième fois…). Azra, dont la beauté est sublimée dans cette scène incarne la pureté et la beauté qu’il ne vivra jamais dans la vraie vie, sur cette terre ; mais il l’aura au moins vécue en rêve.

Toutefois, au nouveau de la couleur de l’image globale du film, ce n’est pas terrible, c’est trop réaliste peut-être, c’est dommage.

.C’est  le premier film tourné en langue tzigane, du côté serbo-croate, en Macédoine, puis dans divers pays de l’Est où sont bien installés les Gitans.

* Ces personnes à l’apparence rarement propre et à l’allure négligée, qui envahissent les trottoirs européens pour éternellement mendier sans travailler… avec leurs enfants dans les bras pour les femmes, et leurs violons à la main pour les hommes, tous virtuoses, certes, mais mendiant, toujours mendiant**… Les femmes et « leurs » enfants n’hésiteront jamais à vous emmerder jusqu’au bout pour obtenir une pièce, peu importe si vous êtes en pleine discussion avec des amis en train de prendre « tranquillement » un café. Les enfants ne sont plus des enfants : leur sourire est automatisé, le son de leur voix calculé, leurs expressions de visage également, ce sont des enfants dressés et robotisés à mendier. Plus d’innocence. C’est un peuple spécialisé dans le vol d’âme, de pureté, d’innocence, de fraîcheur des enfants.
**A part les Gypsy Kings… (Hélas, même les Gypsy King, que j’adore – à cause d’Aurélien- ont tout arrêté à cause de problèmes d’argent et de violence entre eux…).