Un blog pour se remuer les neurones et se secouer les fesses !
Un blog pour encourager tous ceux qui n'ont pas envie de se laisser aller avec non-garantie de succès, ni pour eux, ni pour moi-même. ;-)

jeudi 24 février 2011

NATATION 34, 2 km, Alfred Nakache, le jeudi 24 février 2011.

Arrivée : 20h00
Départ : 21h
2 km
1 km brasse
1 km crawl
Jour de ma rencontre avec Otu, Jennifer et Frank.

mercredi 23 février 2011

NATATION 33, 2km, Alfred Nakache, le 23/02/2011

2000 mètres le 23/02/2011 Piscine Alfred Nakache
Arrivée : 14h15
Départ : 15h15
1km brasse
1 km crawl

lundi 21 février 2011

POULET AUX PRUNES de Marjane Satrapi, 2008 (IRN)


****Excellent.
Histoire : C’est l’histoire d’un musicien, Naser Ali, qui rencontre dans la rue des années plus tard son amour de jeunesse qui ne le reconnaît pas. A la recherche d’un nouveau tar (instrument à cordes iranien) que son épouse a cassé et après plusieurs tentatives ratées de retrouver goût à la musique, il décide de mourir.
Il meurt. La B.D. raconte les sept jours qui ont précédé sa mort et nous voyons successivement ses rapports avec son frère, sa fille, son fils, son épouse et sa mère ainsi que cet amour de jeunesse, qui était la femme de sa vie.
Critique : à offrir d’urgence à tous les amis artistes maudits de la planète (un peu comme la B.D. Kiki de Montparnasse). L’histoire est triste, le ton est très drôle.
Cette B.D. a deux leçons de vie :
La première c’est qu’il ne faut pas épouser une personne juste parce qu’elle est gentille et disponible si elle ne nous plaît pas, car ces mauvaises raisons se paieront plus tard.
La deuxième, c’est qu’il ne faut pas se fier aux apparences en ce qui concerne l’affection que nous portent les autres : parfois, on se trompe énormément.
Citations :
« La cigarette est la nourriture de l’âme » (sa mère)
« Le destin donna raison à Nasser Ali Khan : effectivement, Mozaffar ne devint jamais ni maigre, ni artiste, ni suicidaire, ni même morose et mélancolique ». (son fils)
« Ne t’en fais pas mon petit. Dis-toi que tu vis une véritable histoire d’amour.
- ?
- Mais bien sûr. As-tu déjà vu quelqu’un écrire un poème sur la femme qu’il a épousée et qui l’engueule quatre fois par jour ? Crois-tu que si Roméo et Juliette avaient eu six gosses ensemble, on aurait écrit un livre sur eux ? Tu souffres ! C’est pour ça que tu joues si bien maintenant ! » (son maître de Tar)

Conclusion :
- J’espère que j’écrirai aussi bien que Nasser Ali joue car nous avons les mêmes motivations, même si contrairement à lui je n’ai pas eu la chance que ce soit réciproque. Il faudra donc penser à mettre ce livre dans la bibliographie du roman, je ne sais pas encore dans quel contexte l’inclure dans la fiction.
- Donne envie de manger du poulet aux prunes iranien.

Idée : c’est un cadeau pour Mostafa, qui est iranien.

dimanche 20 février 2011

NATATION 32, 2 km, Piscine Alfred Nakache le 20/02/2011

2000 mètres le 20/02/2011 Piscine Alfred Nakache
Arrivée : 15h40
Départ : 16h45
1 km brasse
1 km crawl
Trop de monde, ça m'a saoulée.

samedi 19 février 2011

Le livre de sable, Jorge Luis Borges, 1975 (ARG).


Le livre de sable, de Jorge Luis Borges, 1975 (ARG).
Nouvelles.

Editions Gallimard, Collection folio, 1978. Lecture achevée le samedi 19 février 2011.

**
Critique : aucune nouvelle n’a modifié mon regard ni sur l’existence, ni sur la littérature.
Toutefois Borges a le mérite d’être un véritable passeur de mémoire littéraire : il fait référence à de nombreux ouvrages littéraires qui me sont totalement inconnus.
Un thème prédomine le recueil par ailleurs : le Temps, entre passé, présent et futur. Ses nouvelles foisonnent de mythes et légendes (souvent nordiques), de fantastique, d’étrange et de merveilleux.
On sent aussi derrière la plume un homme bon, simple, sobre, posé, autrefois fougueux, autrefois passionné.

Je vends mon exemplaire à 3 euros.

L’autre : l’histoire du moi présent qui rencontre son moi passé, jeune.

Citations :

« Je peux te prouver que je ne mens pas. Je vais te dire des choses qu’un inconnu ne pourrait pas savoir. (…) Dans l’armoire de ta chambre il y a deux rangées de livres. Les trois volumes des Mille et une Nuits de Lane, illustrées d’eaux-fortes et avec des notes en petits caractères entre les chapitres, le dictionnare latin de Quicherat, la Germanie de Tacite en latin et dans la traduction de Gordon, un Don Quichotte de chez Garnier, les Tablas de Sangre de Rivera Indarte, avec une dédicace de l’auteur, le Sartus Resartus de Carlyle, une biographie d’Amiel et, cachée derrière les autres, une brochure sur les mœurs sexuelles des peuples balkaniques. », p.9-10

« Père, toujours avec ses plaisanteries contre la foi. Hier soir il a dit que Jésus était comme les gauchos qui veulent jamais se compromettre, et que c’est pour ça qu’il prêchait en paraboles », p.12

« Je vis qu’il serrait un livre entre ses mains. Je lui demandai ce que c’était.
- Les Possédés ou, à mon sens, les Démons de Fedor Dostoïevski, me répliqua-t-il non sans vanité.
- Je l’ai pratiquement oublié. Comment est-ce ?
Dès que j’eus parlé, je compris que ma question était un blasphème.
- Le maître russe, trancha-t-il, a pénétré plus avant que personne dans les labyrinthes de l’âme slave. 
(…) Je lui demandai quels autres livres de ce maître il avait parcourus.
Il énuméra deux ou trois titres, dont Le Double.
Je lui demandai si, en les lisant, il distinguait bien les personnages, comme chez Joseph Conrad, et s’il comptait poursuivre l’examen de l’œuvre complète.
- A vrai dire non, me répondit-il un peu surpris. », p.13

« Il me vint brusquement une idée.
- Je peux te prouver immédiatement, lui dis-je, que tu n’es pas en train de rêver de moi. Ecoute bien ce vers que tu n’as jamais lu, que je sache.
Lentement, je déclamai le vers célèbre :

L’hydre-univers tordant son corps écaillé d’astres
Je sentis sa stupeur presque craintive. Il le répéta à voix basse, savourant chacun des mots resplendissants.
-C’est vrai murmura-t-il. Je ne pourrai jamais, moi, écrire un tel vers.
Hugo nous avait réunis. », p.16

« Auparavant, il avait répété avec ferveur, je m’en souviens maintenant, le court poème où Walt Whitman se remémore une nuit partagée devant la mer et au cours de laquelle il avait été vraiment heureux.
- Si Whitman l’a chantée, observai-je, c’est parce qu’il la souhaitait et qu’elle n’eut pas lieu. Le poème est plus beau si nous devinons qu’il est l’expression d’un désir et non pas le récit d’un fait.
Il me regarda un long moment.
-Vous le connaissez mal, s’écria t-il. Whitman est incapable de mentir. », p.16

Ce passage m’a beaucoup touchée parce qu’il a un rapport direct avec le passage sur la mer, précisément de John Fante : celle dont il est persuadée qu’elle a existé alors qu’elle n’existe pas, celle qui est son cœur et par conséquent, sa mémoire. Cette mer, qui est aussi représentée dans le tableau de Munch, est l’idéal inaccessible que l’on rêve, que l’on tente de vivre maladroitement, que l’on écrit.

« Un demi-siècle ne passe pas en vain. Au travers de cette conversation entre personnes de lectures mélangées et de goûts divers, je compris que nous ne pouvions pas nous comprendre. Nous étions trop différents et trop semblables. (…). Chacun des deux était la copie caricaturale de l’autre. », p.17

« Nous n’avons pas changé, pensai-je. Toujours les mêmes références livresques. », p.18

« Je répondis que le surnaturel, s’il se produit deux fois, cesse d’être terrifiant », p.18

Ulrica : L’histoire d’une rencontre avec une femme norvégienne belle et cultivée avec qui il passe une nuit.

« J’appris par la suite que cela ne lui ressemblait pas, mais ce que nous disons ne nous ressemble pas toujours », P.21

« - Ce n’est pas la première fois que les Norvégiens entrent dans York, remarqua une des personnes présentes.
- C’est vrai, dit-elle. L'Angleterre nous appartenait et nous l’avons perdue, si tant est qu’on puise posséder quelque chose ou que chose puisse se perdre. », p.21

« Elle me dit qu’elle aimait se promener seule.
Je me souvins d’une plaisanterie de Schopenhauer et je lui répondis :
- Moi aussi. Nous pouvons donc sortir ensemble. », p.22

« Dans Oxford Street, me dit-elle, je mettrai mes pas dans les pas de De Quincey, à la recherche d’Ann, perdue dans la foule de Londres.
- De Quincey, répondis-je, a cessé de la chercher. Moi, d’année en année, je la cherche encore. 
- Il se peut, dit-elle à voix basse, que tu l’aies trouvée. 
Je compris qu’une chose inespérée ne m’était pas interdite et je posai mes lèvres sur sa bouche et sur ses yeux. »,p.23

« Je ne commis pas l’erreur de lui demander si elle m’aimait. Je compris que je n’étais pas le premier et que je ne serais pas le dernier. Cette aventure, peut-être l’ultime pour moi, n’en serait qu’une parmi bien d’autres pour cette resplendissante et résolue disciple d’Ibsen.
Nous reprîmes notre chemin la main dans la main.
- Tout ceci est comme un rêve, dis-je, et je ne rêve jamais. », p.24

«  - Je voudrais que ce moment dure toujours, murmurai-je.
- Toujours est un mot interdit aux humains, affirma Ulrica (…) », p.25

« Elle m’appela par mon véritable nom, Javier. (…) Il n’y avait pas d’épée entre nous deux. Le temps s’écoulait comme du sable. Séculaire, dans l’ombre, l’amour déferla et je possédai pour la première et pour la dernière fois l’image d’Ulrica. », p.26

Le Congrès : est l’histoire d’un « projet de créer un Congrès du  Monde qui représenterait tous les hommes de toutes les nations », une utopie. Ils n’arriveront pas à concrétiser leur projet car n’arrivent pas à s’entendre sur les livres qui constitueraient une bibliothèque mondiale « témoin » et dépensent trop d’argent. Ils finissent par brûler tous les livres achetés et à se séparer.

« Par indécision, par négligence ou pour d’autres raisons, je ne me suis pas marié, et maintenant je vis seul. (…) Quand j’étais jeune, j’avais de l’attirance pour les crépuscules, pour les faubourgs et pour le malheur ; aujourd’hui, j’aime les matinées en plein cœur de la ville et la sérénité. Je ne joue plus les Hamlet. Je me suis inscrit à un club conservateur et à un club d’échecs, que je fréquente en spectateur, parfois distrait. », p.28

« Il nous dit, dans son habituel langage fleuri, que la bibliothèque du Congrès du Monde ne pouvait s’en tenir à des ouvrages de consultation et que les œuvres classiques de tous les pays et de toutes les langues constituaient un véritable témoignage que nous ne pouvions négliger sans danger », p.46

« (…) mais Béatrice Frost, comme Nora Erfjord, était une adepte de la religion prêchée par Ibsen, et elle ne voulait s’attacher à personne. », p.49

« Elle ne voulut pas voir le bateau ; les adieux, à son avis, étaient de l’emphase, la fête insensée du chagrin, et elle détestait les emphases. Nous nous dîmes adieu dans la bibliothèque où nous nous étions rencontrés l’autre hiver. Je suis un homme lâche : je ne lui donnai pas mon adresse pour m’éviter l’angoisse d’attendre des lettres », p. 49

« Le Congrès, c’est –je le sais maintenant- le monde entier. (…) Le Congrès, c’est les livres que nous avons brûlés. Le Congrès, c’est les Calédoniens qui mirent en déroute les légions des Césars. Le Congrès, c’est Job sur son fumier et le Christ sur sa croix. Le Congrès, c’est ce garçon inutile qui dilapide ma fortune avec des prostituées. », p.54

« - Moi aussi, don Alejandro, je suis coupable. J’avais terminé mon rapport, que je vous apporte ici, et je me suis attardé en Angleterre à vos frais, pour l’amour d’une femme. », p.54

There are more things : histoire fantastique à la Poe, en moins bien. Il va dans la maison de son oncle décédé, qui est hantée par des êtres fantastiques.

Mot appris : AMPHISBÈNE, subst. masc.
ERPÉTOLOGIE. Reptile saurien annelé de la famille des amphisbénidés, dont la queue est aussi grosse que la tête et auquel les Anciens attribuaient le pouvoir de se déplacer aussi bien en avant qu'en arrière.

La Secte des Trente : nom d’une secte catholique hérétique qui fait des trucs de oufs.

Raison du nom donné à la secte :
« De volontaires, il n’y en eut que deux : le Rédempteur et Judas. Ce dernier jeta les trente pièces qui étaient le prix du rachat des âmes et aussitôt après il se pendit. Il avait trentre-trois ans, comme le Fils de l’Homme. La Secte les vénère tous deux à égalité et elle absout tous les autres.
« Il n’y a pas un seul coupable ; il n’y en a pas un qui soit autre chose qu’un exécutant, conscient ou non, du plan tracé par la Sagesse. Tous partagent maintenant la Gloire.

La nuit des dons : histoire qui m’a saoulée, j’ai dû la relire plusieurs fois sans m’y intéresser.
Le miroir et le masque : L’histoire d’un poète à la cour irlandaise qui la première fois n’étonne pas le roi et ne le satisfait pas. La deuxième fois il y parvient inspiré de façon mystique au réveil. Le Roi avait donné deux cadeaux pour le premier : le miroir et le masque, le troisième est une dague pour ce poème : le poète se suicide et le Roi mendie. L’idée c’est qu’une fois qu’on a connu la Beauté, on ne peut plus vivre.

« Celui que désormais nous sommes deux à avoir commis, murmura le Roi. Celui d’avoir connu la Beauté, faveur interdite aux hommes. Maintenant il nous faut l’expier. », p.91

UNDR :  Encore une histoire à laquelle je n’ai pas été attentive. Se passe dans un pays nordique, celui des Urniens.

« J’aurais voulu que ce chant durât toujours et devînt ma vie », p.97.

« Qu’as-tu reçu de la première femme qui s’est donnée à toi ? me demande-t-il.
« - Tout, lui répondis-je.
«  - La vie, à moi aussi, m’a tout donné. A tous la vie donne tout mais la plupart l’ignorent. Ma voix est fatiguée et mes doigts sans force, mais écoute-moi.
« Il prononça le mot Undr, qui veut dire merveille. », p.100

Utopie d’un homme qui est fatigué : Je ne suis pas sûre d’avoir compris le message de cette nouvelle mais il me semble que Borges veut nous faire comprendre l’importance de la mémoire. De l’histoire. On devrait comprendre que sans mémoire on dit et fait n’importe quoi, que la vie n’a pas de sens. C’est ma nouvelle préférée du recueil, à son ton triste et mélancolique (l’homme fatigué).

« Je me demandai, sans y attacher trop d’importance, si j’étais dans l’Oklaoma ou au Texas, ou bien dans la région qu’en littérature on appelle la pampa. », p.101
« Dans nos écoles on nous enseigne le doute et l’art d’oublier. Avant tout l’oubli de ce qui est personnel et localisé. Nous vivons dans le temps, qui est succession mais nous essayons de vivre sub specie aeternitatis. Du passé il nous reste quelques noms que le langage tend à oublier. Nous éludons les précisions inutiles. Plus de chronologie ni d’histoire. Il n’y a plus non plus de stastistiques. Tu m’as dit que tu t’appelais Eudoro ; moi je ne puis te dire comment je m’appelle, car on me nomme simplement quelqu’un. », p.104
«- A cent ans, l’être humain peut se passer de l’amour et de l’amitié. Les maux et la mort ne sont plus une menace pour lui. Il pratique un art quelconque, il s’adonne à la philosophie, aux mathématiques ou bien il jour aux échecs, solitairement. Quand il le veut, il se tue. Maître de sa vie, l’homme l’est aussi de sa mort.
- Il s’agit d’une citation ? lui demandai-je.
- Certainement. Il ne nous reste plus que des citations. Le langage est un ensemble de citations. », p. 108
« - Que sont devenus les gouvernements ? demandai-je.
- La tradition veut qu’ils soient tombés petit à petit en désuétude. Ils procédaient à des élections, ils déclaraient des guerres, ils établissaient des impôts, ils confisquaient des fortunes, ils ordonnaient des arrestations et prétendaient imposer la censure mais personne au monde ne s’en souciait. La presse cessa de publier leurs discours et leurs photographies. Les hommes politiques durent se mettre à exercer des métiers honnêtes ; certains devinrent de bons comédiens ou de bons guérisseurs », p.109
« - C’est le crématoire, dit quelqu’un. A l’intérieur se trouve la chambre de mort. On dit qu’elle a été inventée par un philanthrope qui s’appelait, je crois, Adolf Hitler. », p.111.
Le stratagème : l’histoire d’un universitaire qui va inventer un stratagème pour obtenir le poste qu’il convoite : sachant la qualité d’un homme à toujours accepter les points de vue différents du sien ; il fait exprès de l’attaquer car il sait qu’il fait partie du jury et que malgré les attaques, il va le choisir lui, pour prouver qu’il est ouvert d’esprit. Après avoir réussi son coup, il avoue son stratagème ; l’autre reconnaît qu’il a pêché d’orgueil de son côté.
« Cependant, nous ne sommes pas si différents. Un péché nous unit : l’orgueil. Vous, vous m’avez rendu visite pour vous vanter de votre ingénieux stratagème ; moi, j’ai appuyé votre candidature pour pouvoir me vanter d’être un homme probe.
-Une autre chose nous unit, répondit Einarsson : la nationalité. Je suis citoyen américain. Mon destin est ici, non dans la lointaine Thulé. Vous me direz qu’un passeport ne modifie pas le caractère d’un homme.
Ils se serrèrent la main et se quittèrent. », p.122-123.

Avelino Arredondo : Fait réel de 1897 à Montevideo. L’histoire d’un homme timide dont tout la bande d’amis se moque souvent, toujours silencieux. Petit employé dans une mercerie, étudiant le droit à ses moments perdus, ne se prononce jamais quand ses amis se plaignent du président qui fait durer la guerre. Du jour au lendemain, il quitte sa petite-amie qu’il aime ainsi que ses amis pour se préparer en reclu, à accomplir son destin. L’histoire serait vraie et une rue porte son nom aujourd’hui, Borgès n’approuve pas le crime politique, malgré Charlotte Corday et Brutus.
« Vers le milieu de son temps de réclusion Arredondo parvint plus d’une fois à vivre ce temps presque hors du temps. Il y avait dans la cour du devant un crapaud au fond ; il ne lui vint jamais à l’idée que le temps du crapaud, temps voisin de l’éternité, était cela même qu’il souhaitait », p. 129.
Le disque : Un homme rencontre un autre homme qui prétend avoir reçu un disque d’Odin. Il se trouve qu’il voit en effet un éclair. Il tue le vieil homme pour posséder le disque, voit l’éclair de nouveau mais le disque disparaît.
Le livre de sable : Un homme reçoit chez lui un V.R.P. de bibles qui lui propose un livre spécial qui n’est pas une bible : les pages ne s’arrêtent jamais à l’infini et leur numérotation est arbitraire, c’est le livre de sable. Il a aussi des illustrations qui apparaissent puis disparaissent, qu’on ne voit qu’une fois puis plus jamais. N’ayant pas les moyens de l’acheter, l’homme décide de lui donner toute sa retraite et la Bible de Wiclef en caractères gothiques. Mais il a tellement peur qu’on le lui vole qu’il abandonne toute vie sociale. Il comprend que ce livre est maudit et décide de le ranger incognito dans les rayons de la Bibliothèque nationale où il travaillait avant. Il est soulagé mais n’ose même plus passer rue Mexico.


vendredi 18 février 2011

NATATION 31, 1 km, Alfred Nakache

1000 mètres le 18/02/2011 Piscine Alfred Nakache

Arrivée : 16h59
Départ : 17h29


500 m brasse
500 m crawl


Ne faire qu'un kilomètre c'est frustrant mais aujourd'hui j'ai flingué ma journée avec un RDV chez le médecin et un réveil beaucoup trop tardif à cause de The Sandpiper que j'ai fini de regarder à 3h du mat...Je me maudis.
C'est décidé : le 1er mars, je prends mon abonnement et j'en fais tous les 2 jours, c'est fini de rigoler.

mercredi 16 février 2011

NATATION 30, 2km, Alfred Nakache, 16/02/11

Alfred Nakache, le 16 février 2011.
Arrivée : 15h45
Départ : 16h45
1 km brasse
1 km crawl
Ce que ça fait du bien !

mardi 15 février 2011

DIADORIM DE JOAO GUIMARAES ROSA, 1956 (BRÉSIL)





LECTURE ACHEVEE LE MARDI 15 FEVRIER 2011.

« Le jagunço est comme ça, il se fâche pas d’une défaite ni d’une déroute, il s’en fout presque, j’ai jamais vu ça. Pour lui, la vie est bien réglée : manger, boire, jouir des femmes, se battre, et puis la fin des fins. Tout le monde est-il pas comme ça ? », p.45

« Mais j’aimais Diadorim pour ce qu’il savait que ces Gerais sont beaux » p.45

« (…) le dégoût est une invention de Celui-qu’existe-pas pour empêcher qu’on ait pitié. », p.47
(Celui-qu’existe-pas : le démon).

« Je suis né pour jamais trouver un homme qu’ait les mêmes goûts que moi. », p.48
« L’amour ? Un oiseau qui pond des œufs de fer. Le pire, c’est quand j’ai commencé de passer des nuits blanches, sans jamais pouvoir dormir. C’était de Diadorim dont il s’agissait. Il laissait rien paraître de ce qu’il pensait ou même soupçonnait. Je crois que j’étais comme ça aussi. Je voulais en savoir plus que lui ? Oui et non. C’est parce qu’on conserve secrète une idée absurde qu’elle a pas de conséquence. Je suis retourné à la froide raison. Maintenant que Monsieur voie comment va le destin : j’ai rapporté cette topaze pour la donner à Diadorim et elle a fini par être un cadeau pour Otacilia. Aujourd’hui, elle orne la main de ma femme. », p.49

« Vivre, c’est une suite d’erreur », p.55

« Y a des moments, je crois, qu’on a besoin de s’éveiller d’une sorte d’enchantement où gens et choses sont pas réels ! Et c’est de ça que peu à peu on éprouve un vague regret ? Est-ce qu’on aurait déjà tous vendu nos âmes ? », p.65 (suite à une conversation avec Diadorim qui lui dit des choses charmantes et affectueuses).

« Ce qu’une personne bien instruite peut inventer comme choses presque vraies ! ça peut emplir le monde d’autres mouvements, sans les tours et détours de notre vie mal foutue. Une vie déguisée ? En quelque sorte ? », p.66

« Dans la vraie vie, les choses finissent moins grandement, elles finissent même pas. Ça vaut mieux. S’obstiner à trouver l’exactitude, ça se termine par une erreur. On en veut pas. Vivre, c’est très dangereux… », p.66

« J’aimais Diadorim d’une façon interdite, je pensais même pas que j’aimais, mais je savais déjà alors que j’aimais pour toujours… », p.72

« Je voudrais comprendre la peur et le courage, l’envie qui vous porte à faire des tas de choses, à trouver de l’intérêt dans la réussite. Ce qui vous incite à faire des actes étranges, c’est ce qu’on est tout près de ce qui est vraiment à vous, et on le sait pas, le sait pas, le sait pas ! », p.77

Problème p.87-88 : Riobaldo est invité souvent par une famille turque, mais il dit qu’ils parlent arabe, or les Turcs ne parlent pas arabe. « J’ai surtout goûté la viande hachée avec des grains de blé, d’autres ragoûts, une bonne farce dans des courgettes ou des feuilles de vigne, et cette façon de confire le gombo dans la vinaigre…une cuisine de première. Les sucreries aussi. J’ai bien estimé sieur Assis Wababa, sa femme dona Abadia, même les enfants, les petits frères à Rosa’uarda, mais très différents d’âge. La seule chose qui me gênait, c’était la langue gutturale qu’ils parlaient entre eux, l’arabe. », p.88

« Malgré tout j’affirme que Rosa’uarda m’a aimé, elle m’a enseigné les premiers libertinages, et les libertinages complets auxquels on s’est livré ensemble, cachés au fond du jardin, me remplissaient d’anxiété et de délectation. Elle me disait des câlineries turques, m’appelait : « Mes yeux ! » Mais ses yeux à elle étincelaient d’exaltation, extraordinairement noirs, d’une beauté singulière. Toute ma vie j’ai beaucoup aimé ce qu’est étranger. », p.88

è Ben sa Rosa’uarda, la façon dont il en parle, c’est mon Ludo à moi que j’ai aimé de tout mon cœur, mais c’était moi l’étrangère…D’ailleurs il ne l’inclut pas dans ses amours (p.106), mais dans son apprentissage sexuel, ce qui est fort vexant, car Rosa’uarda l’a aimé, merde.

« Je vais dire à Monsieur une chose qu’on connaît guère : quand on commence à avoir de l’amour pour quelqu’un dans le courant journalier, cet amour prend et grandit parce qu’en quelque sorte on veut que ça soit, dans sa pensée, on le désire et y aide ; mais, quand c’est fixé par le destin, on aime fatalement, sans avoir besoin de le désirer ; on se trouve d’un coup devant la surprise. Un amour pareil, ça pousse d’abord, ça jaillit qu’après. », p.105

Amour « ordinaire » : Otacilia.
Amour « destin » : Diadorim.
« Otacilia était une pure créature de beauté. Je raconterai ça plus tard, y a du temps pour tout. Le mal, chez moi, quand j’allais et venais, c’était que je parvenais pas à équilibrer une main avec l’autre, l’amour et l’amour. Peut-on ? Des fois je me dis : « Si cet amour est venu de Dieu, tel qu’il est venu, de qui est venu l’autre ?... » Un rude tourment. Avec moi, rien n’a d’aujourd’hui ni d’avant-hier, c’est du toujours. Des tracas. J’ai mes fautes, je le dis franchement. Mais quand ces fautes ont commencé ? Monsieur comprend pas bien, peut-être qu’à la fin il comprendra. Mais la vie, ça se comprend pas. », p.106

« Mais le plus curieux et le plus joli de tous, d’amont en aval, comme m’a dit Reinaldo, était encore le manuelzinho-da-crôa, le chevalier-des-sables. (…) De tous les plus gentils oiseaux, le chevalier-des-sables est le plus beau. », p.108
Film sur cet oiseau : The Sandpiper, 1965, avec Elizabeth Taylor et Richard Burton.(je l'ai regardé du coup : c'est un film féministe qui pose des questions encore actuelles : la femme intelligente et libre est une pute ; la femme gentille et douce est la mère au foyer).

« Dès cette heure, j’ai reconnu que Reinaldo pouvait dire n’importe quoi et j’en étais retourné », p.109.

« Je parle pas de nos autres compagnons, je m’en tenais à l’écart, de braves gars bien ordinaires, de simples croquants du pauvre Nord, voilà ce qu’ils étaient. C’était pas par orgueil personnel, simplement par manque de patience ; je crois que j’ai jamais aimé les êtres qui se contentent de peu. Je suis comme ça. » p.112.

« Tu sais pas que l’homme tout à fait vaillant peut pas avoir autre chose qu’un bon cœur ! » Il m’a dit ça, je l’ai retenu. J’ai réfléchi, pensé, repensé. Pour moi, ce qu’il venait de dire était pas toujours vrai. (…) Et Monsieur verra à la fin que cette vérité sert à augmenter encore ma honte et mon affliction. », p.113 (Reinaldo à Riobaldo).

« Mais j’avais surtout envie d’être seul. Même Reinaldo m’était d’aucun secours. Je suis seul, je veux être seul, j’aime être seul dans les heures difficiles. C’est ça que je cherche, Reinaldo était à côté de moi, et l’angoisse de ma peur me faisait n’y accorder aucune valeur. Un homme comme moi, être triste auprès d’un ami l’affaiblit. J’aurais même souhaité être désespéré, un calme désespoir est parfois le meilleur remède, il détache du monde, vous libère. La peur vous prend par les racines. J’ai continué de marcher. Puis soudain y a eu en moi une lueur, une grande idée, une étoile d’or.  Et j’ai vu que c’était là mon recours.
(…) compère Quelemem m’a appris qu’on peut réaliser tous ses désirs si pendant sept jours d’affilée on a la constance de faire tout ce qui vous déplaît, dégoûte, chagrine et fatigue, et de renoncer à tout plaisir. Il l’a dit. Je le crois. Il m’a aussi enseigné qu’il était encore mieux et meilleur de répudier même ce premier désir qui vous a donné du courage pour ces pénitences, et de vouer tout à Dieu qui vient alors vous donner des buts plus élevés, vous payant et vous repayant des intérêts sans limite. Ça, c’est de compère Quelemem. Une sorte de prière ?
Bon. Cette nuit-là, j’arrivais pas à prier. J’y ai même pas pensé. (…). Voilà : pendant ce jour qui venait, je fumerais pas, même si j’en avais très envie, je dormirais pas, je me reposerais pas, ni assis, ni couché. Et puis je rechercherais pas la compagnie de Reinaldo, ni sa conversation, ce que j’aimais plus que tout. J’ai décidé ça et en ai été tout aise. La peur a quitté ma poitrine, mes jambes. Les serres de la peur se relâchaient déjà. », p.114-115.

C’est exactement ce que j’ai fait sans avoir lu ce passage (ou presque) : j’ai rejeté ce que je désirais le plus au monde ; je me suis dit qu’il fallait avoir un but personnel plus élevé (j’en ai un) et ça va mieux depuis, ça ne m’a pas enlevé de peur (que je n’avais pas), mais du chagrin.
« « Alors, mon vrai nom, c’est Diadorim…Garde ce secret pour toi. Quand on sera seuls, tu devras m’appeler Diadorim, je te le demande Riobaldo. » C’était si étrange que je suis longtemps resté à répéter ce nom pour m’y habituer. Il m’a donné la main. Cette main m’a transmis une certitude. Et ses yeux. Ses yeux qu’il fixait sur moi, éloquents, preque tristes à force d’être grands. Son âme se peignait sur son visage. J’ai deviné ce que nous désirions tous deux, que je dise maintenant : « Diadorim, Diadorim ! » avec une grande affection. Il a souri gravement. Et je l’aimais, je l’aimais, l’aimais…Alors j’ai ardemment désiré qu’il ait besoin de ma protection toute sa vie, moi, combattant pour lui, le défendant. Ses yeux surtout me troublaient, d’autant plus qu’ils ne m’affaiblissaient pas. Diadorim… », p.117

« Il m’aimait avec son âme », p.119 (Riobaldo parlant de Diadorim).

« Alors j’étais différent de tous les autres ? Oui. Heureusement pour moi. Tous ces gens sans aveu, passant jour et nuit à se reposer, à se chamailler, à boire, à manger tout le temps. « T’as mangé, loup ? » Et puis ils se disaient des tas d’âneries (…) », p.128
 Johnatan Livingstone le Goéland de Richard Bach a été écrit après, version bandit brésilien.

« Pour moi, un ami c’est autre chose. C’est pas un accord pour rendre ou recevoir un service, c’est pas une aide mutuelle même si les autres en pâtissent. Pour moi, un ami est une personne avec qui on aime à parler d’égal à égal, sans arme, celui dont le voisinage vous rend heureux. Presque rien d’autre », p.134.

« Mon corps aimait le sien, en spectateur. Enormément. », p.135

« Je l’ai pas fait. Peut-être j’ai même pas pensé vraiment à Diadorim, ou alors comme simple excuse. Une excuse pour ma conduite. Plus on tombe bas, plus on veut se respecter soi-même. De moi, j’accepte tous les mensonges. Monsieur est pas pareil ? On l’est tous. Mais j’ai toujours été un fuyard, au point que j’ai fui la nécessité d’une fuite. » (lol), p.137

Ça c’est du Bardamu tout craché. Donc Riobaldo voulait se barrer, ne plus être jagunço, l’a proposé à Diadorim qui n’a pas voulu (veut venger son père) mais ne l’a finalement pas fait.
« Aujourd’hui je sais, c’était une peur réfléchie. Peur de me tromper. Je l’ai toujours eue. Ma patience, c’est seulement la peur de me tromper. Monsieur le croit ? Si on pouvait se débarrasser de la peur de se tromper, on serait sauvé. Monsieur comprend mon idée ? », p.137

« L’homme a-t-il été fait pour être seul ? Oui, mais je le savais pas. », p.138

Monsieur comprendra ? Moi, je comprends pas. Cet Hermogenes me faisait ses amabilités. Je plaisais à un démon pareil. Il me saluait toujours avec estime, me lançait une amicale plaisanterie, quelques bonne paroles, on l’aurait jamais pris pour le chef. Par courtoisie et vu ma situation, j’étais bien obligé de répondre. C’était difficile. Ça m’irritait. Il me dégoûtait, je l’ai déjà dit à Monsieur. Une aversion née au fond de moi-même. Jamais je l’ai regardé dans les yeux. Un dégoût éternel, raison de plus pour tenir mes distances. Pour moi cet homme existait pas. », p.139

Qui n’a pas vécu cet inconfort horrible de devoir répondre à un chef qui essaye d’être gentil avec nous et qu’on peut pas supporter ?
 « Moi, j’aime être tranquille loin des gens au pouvoir, même quand je les connais bien. (…) Personne peut me changer avec des cadeaux et de belles paroles. », p.139

« Elle était souriante et jolie à croquer, mais aujourd’hui, Monsieur comprend, ça lui conviendrait plus beaucoup, ça me gênerait plutôt d’en parler. », p.140 (ah ah)

« Epousez-moi » a murmuré Otalicia.(…). Quant aux autres, les femmes livres, dissolues, elles répondaient : « Couchez-avec-moi… » C’est ça que m’aurait certainement répondu cette jolie Nhorina, la fille à l’Ana Duzuza, aux confins des gerais, qui m’a aussi aimé et que j’ai aimée. Ah, la fleur d’amour a beaucoup de noms ! Nhorina, prostituée, piment blanc, bouche parfumée, haleine d’enfant. Ma vie est bien confuse, comme le rio Urucia, qui va se jeter dans la mer. », p.141

« Il m’aimait, effet du destin. Et moi, comment expliquer à Monsieur la puissance de l’amour que j’ai éprouvé ? Ma vie le prouve. Un amour qu’avait pas de limite. Je serais allé jusqu’au bout du monde…Diadorim me tenait complètement enchaîné. »
« Mais je voulais pas aimer Otacilia de la même façon, bien que je me sois jamais souvenu de Rosa’uarda avec mépris. Je crache pas dans le plat après m’être régalé. (…) J’ai soigneusement préparé tout ce que je dirais. Je voulais parler d’un cœur fidèle, prononcer des paroles passionnées. Dire des poésies. Mais ce que je voulais sincèrement, c’était –comme on raconte dans les livres, Monsieur sait : bien voir, bien faire, bien aimer. », p.143.

« (…) j’avais nié et renié Diadorim que j’aimais tant. C’est ce que j’ai senti. Le soleil s’est couché », p.144
« Riobaldo, tu aimes cette fille ? »
(…)
« Non, Diadorim. Non, je ne l’aime pas. » J’ai nié et renié, mon âme était soumise. », p.145

è Passage de Faulkner similaire et chez Fante aussi : toujours la même chose.

« Monsieur sait que ç’a toujours été mon idée, je veux que le bon soit bon et le mauvais mauvais, un côté noir et l’autre blanc, le laid bien séparé du beau et la joie loin de la tristesse ! Je veux que les pâtures soient délimitées…Comment puis-je marcher avec ce monde ? La vie est bien ingrate malgré toute sa douceur. Mais l’espérance apparaît au milieu du fiel du désespoir. Enfin, ce monde est bien embrouillé… », p.162

« Mes efforts pour oublier Diadorim me donnaient une grande tristesse, une lassitude. Mais je pensais pas au passé, je m’y arrêtais pas. C’était un moment bien dur, mais il le fallait. L’eau du fleuve qui s’écoule. Des jours qui duraient, duraient. Maintenant je m’en souciais plus. Monsieur sait, aujourd’hui, je trouve que nos sentiments tournent, mais ils tournent entre eux. La grande joie tourne à la peur, la peur à la haine, la haine au désespoir, hein ? Le désespoir a du bon quand il tourne à la grande tristesse, tout comme un amour…une grande nostaligie…alors naît un nouvel espoir. Mais la braise de chaque chose, c’est toujours le même charbon. Une idée à moi que je trouve sensée. », p.170

« Mais d’autres fois j’avais le sentiment qu’on pouvait pas avoir pitié du démon, aucune, et voilà pourquoi : le démon s’amène en douche, tout doux, jouant l’innocent, mélancolique. Donc Monsieur s’arrête auprès…Alors il se met à danser et gambiller, dit de grands mots, veut vous embrasser, fait un tas de simagrées…à bouche que veux-tu. Parce qu’il est fou, sans rémission. Autant de danger. Et, en ces jours-là, j’étais aussi bien embrouillé », p.172

« A ce propos je me suis rappelé un conseil que Zé Bebelo m’avait un jour donné à Nhanva. Il faut parfois feindre d’être en colère, mais il faut jamais se permettre de l’être, car si on met sa colère contre quelqu’un, c’est tout comme si à ce moment on lui permettait de diriger votre pensée et vos sens, ce qui est réellement un manque d’autorité et pure bêtise. », p.173

« J’étais l’avoir et lui le doit. », p.174 (je n’ai pas compris : Riobaldo l’avoir et Diadorim le devoir).
« Et soudain je l’ai aimé, aimé d’une façon extraordinaire, aimé encore plus qu’auparavant, mon cœur à ses pieds pour qu’il le foule, et je l’avais tout le temps aimé. Je l’ai aimé d’un tel amour…alors je l’ai cru. Et puis, c’est pas toujours ainsi ? », p.174

« Dès cette époque je trouvais que, par manque de bon sens et de gaîté votre vie erre à l’aventure, comme une histoire sans queue ni tête. La vie, ça devrait être comme au théâtre, chacun jouant tout son rôle avec ardeur. C’est mon avis de toujours. », p.179.

« C’est seulement pour le nom de sa mère, ou si on est traité de voleur, qu’y a pas de pardon, c’est des injures graves. », p.193
Toujours ces histoires d’insultes de la mère…

« Moi José, Zé Bebelo, et mon nom : José Rebêlo Adro Antunes ! », p.202 (on sait le nom entier de Zé Bebelo).

« En fait il avait rejeté Zé Bebelo. J’avais pas oublié ses mots qu’aujourd’hui c’était le monde à l’envers. Je l’ai dit à Diadorim, mais il m’a pas répondu. Voilà ce qu’il m’a dit : « Riobaldo, t’aimerais aller vivre à Os Porcos, où il fait toujours beau, où les étoiles luisent tant ?... », p.206
è Réflexion sur la poésie, le monde à l’envers, Diadorim répond sans répondre.

« D’abord j’ai su que j’aimais Diadorim, d’un amour mal déguisé en amitié. Ça m’est apparu d’un coup. Je m’en suis parlé. J’ai pas eu peur, j’ai pas eu peur, j’ai pas trouvé ça mal, je suis rien reproché…sur le moment. », p.210

« Le nom de Diadorim que j’avais prononcé restait en moi. J’ai étreint ce nom.

« Diadorim, mon amour… » Comment pouvais-je dire ça ? Je l’explique à Monsieur : c’était comme si d’un coup j’avais perdu toute honte. Dans ma pensée Diadorim avait pris une bien autre figure, un peu étranger, une sorte d’apparition hors de la vie commune, à part de tous, de toutes les autres personnes, comme quand la pluie ondoie les champs. Un Diadorim pour moi seul. Tout a ses mystères. Je savais pas. Mais en pensée, j’étreignais avec mon corps ce Diadorim…qu’était pas réel. L’était-il pas ? Y a des choses qu’on peut pas expliquer. Je devais avoir commencé de penser à lui, tout comme pense sûrement le serpent quand il fixe l’oiseau qu’il veut prendre. Mais y avait en moi un serpent. Ça me transformait, ça me faisait grandir avec une intensité douloureuse et agréable. A cette heure, j’aurais pu mourir. Je m’en foutais. », p.211

è Diadorim sublimé, mythifié. Le Camilla Lopez d’Arturo Bandini. La Dulcinée de Don Quichotte. La quête de l’impossible, de l’amour impossible.
« Puis je me suis rendu compte que je regardais Diadorim, que je le dévisageais fixement, sans parler, mais en me répétant : « Je nie t’aimer d’un amour malsain. Je t’aime seulement en ami. » Je l’ai ressassé. Et depuis, chaque fois que j’étais auprès de Diadorim, j’ai continué de me le dire. J’avais même fini par y croire. Ah, Monsieur, comme si obéir à l’amour c’était pas toujours le contraire… », p.212

« Moi, je voyais qu’à travers lui. Il était pour moi tout ce qu’y a de bon dans la vie. », p.220

« T’as pas peur, Riobaldo ? » a demandé Diadorim. Moi ? Avec lui je me serais embarqué pour n’importe où, même sur une planche ! », « Le dué du monde, c’est le courage », ai-je dit. » p.221

« Mais la liberté, c’est seulement un pauvre petit sentier entre les grilles d’une grande prison. Y a une vérité secrète qu’on devrait apprendre et que personne enseigne jamais : la façon de se libérer. Je suis un ignorant, mais que Monsieur me dise si la vie c’est pas une chose terrible ? Rabâchage. », p.222

« Diadorim seul avait un sentiment qui durait toujours. Un mystère que la vie m’a révélé, j’en ai eu le vertige. Avant, j’ai perçu la beauté de ces oiseaux du Rio das-Velhas, je l’ai perçue pour toujours. Le chevalier-des-sables. », p.225.

« On peut vivre auprès de quelqu’un et connaître une autre personne sans risquer de haine, seulement si on a de l’amour. Tout amour est déjà un peu de santé, une pause dans la folie. Dieu sait », p.226

« Ah, ce que je comprends pas, ça peut me tuer… » Je me suis souvenu de ces paroles. Mais ces paroles, c’était lui, Zé Bebelo, qui les avait prononcées dans une autre occasion.», p.237-238

« Il m’est venu une pensée : la haine, c’est se souvenir de ce qu’on devrait pas, l’amour c’est vouloir ce qu’on est. », p.261

« Mais penser à la personne qu’on aime, c’est comme rester au bord de l’eau pour attendre qu’à un moment le ruisseau s’arrête et cesse de courir. », p.261

« Je dis aussi : faut jamais se mêler à des gens très différents de soi. Même s’ils ont pas de malice personnelle, ils ont une vie renfermée dans leurs coutumes à eux, et Monsieur est d’ailleurs, Monsieur court des dangers qu’il peut pas sentir. Je l’ai appris des anciens. Le bon, c’est que chacun fuie ce qui lui correspond pas. Le bon loin du mauvais, le sain loin du malade, le vivant loin du mort, le froid loin du chaud, le riche loin du pauvre. Que Monsieur ne néglige pas cette règle, qu’il tire sur ses rênes des deux mains. », p.281

« Et soudain a circulé l’avis que Jõe le Drôle et Pacama-les-Crocs savaient une prière à saint-Sébastien et à saint-Camille de Lélis protégeant de tout mal errant. », p.283

« C’était rien que par leurs yeux que j’explorais ce que les gens avaient dans le ventre, rien que par les yeux », p.307

« L’amour, c’est comme ça : un rat sort de son trou, et c’est un rat géant, un tigre-lion », p.308

« Calmement, c’est très calmement qu’on attire l’amour, comme les choses vous attirent par leur calme. », p.334

« Passopreto », p.353, oiseau noir

« La vie, c’est incertain et variable », p.360

« Parce que vivre, c’est bien dangereux », p.362 (leitmotiv du roman)

« Tandis que je méditais sur mon destin, Diadorim m’a demandé ça, avec une mélancolie affectueuse :
« Riobaldo, tu crois qu’une chose mal débutée peut un jour bien finir ? »
Agacé, j’ai répliqué :
« Dis donc frère, je te reconnais pas ! Suis-je pas Crotale-Blanc ? Faut que je fasse ça. Avant tout ! »
Diadorim est resté silencieux, il a gardé le secret de sa personne. Il s’était caché, et je ne le savais pas. Je savais pas qu’on ne comprenait pas tous deux, pour mon malheur. Aujourd’hui, je sais, et j’ai vraiment souffert. J’avais cru que c’était une récrimination stupide, peut-être de la peur. Il venait pour tout me dire et moi, dans mon emportement, j’ai pas compris. Voyez-vous ? La vie, c’est rien que contradiction. Y a des rôles. Y a des ruses. Y a de l’ombre de Siruiz. Y a toutes les formes du Renégat et les penchants de la vie. », p.363-364

(Siruiz, c’est son cheval).

« Quand il y a des araignées, des fourmis et des abeilles, ça indique qu’il y a des fleurs. », p. 366

« Surtout que Monsieur me juge pas mal pour ce que je dis : je suis marié, légitimement, ma grande affection pour ma bonne femme est chez moi de l’or pur. Mais si j’étais resté à São Josézinho, si j’avais par bonheur renoncé à ce commandement où j’étais Crotale-Blanc, que de choses terribles le vent aurait emportées et seraient pas arrivées ? Ce qui est possible…ce qu’a été est possible. (…) Mais ce que j’en dis, c’était en pensant à Nhorinha, à cause de ça. Ça vous fait toujours mal quand on pense à tout l’amour qu’on a eu à portée et qu’on a repoussé un jour. Mais, comme les jagunços qu’on était, on est parti de l’avant, avec de bons chevaux pour la remonte. Sur les plateaux sableux des gerais, pleins de vide. Sur les sables gris et morts, sans montagne pour couper le vent. », p.376


« Si j’y vais aussi, c’est pas tant pour venger mon père Joca Ramiro comme c’est mon devoir, que pour te servir Riobaldo, par ma volonté et mes actes… »
J’y ai même pas fait attention. « C’est Hermogenes qu’il faut liquider » que j’ai dit. Diadorim avait presque les larmes aux yeux, frustré de ses espoirs. Il me regardait, et j’ai pas compris. Je trouvais normal qu’il me soit dévoué ? Pour sûr. J’ai pas discerné les subtilités. Mais je pense aussi que j’ai pas pu répondre parce que mon attention était détournée. On s’est trouvé à ce moment dans un essaim de fourmis volantes. J’en avais jamais vu tant, par bandes, emplissant l’air de leur bourdonnement, puis tombant, vu que normalement leur corps est si pansu, si oeuvé, une grosse bête bien mûre, qu’elles peuvent plus se maintenir en vol et couvrent des empans de terre d’une couche noire et cuivrée. Leur odeur flottait partout, une odeur de citron roux qu’on grille sur une plaque. (long passage sur les fourmis volantes). Heureusement pour elle que chaque fourmi savait qu’à peine au sol elle devait bien vite creuser son trou pour disparaître, sans le temps de choisir, dépouillée de ses ailes qu’elle arrache comme des petits bouts de papier. Dans le monde, chaque bête a ses usages. Mais quand j’ai regardé de nouveau, Diadorim avait disparu, fondu dans la masse des autres. Malheur ! Et j’avais mal compris. », p.385

« Alors, l’amour c’est ça, aimer bien et mal faire ? », p.396

« Je le sais : celui qui aime est toujours très soumis mais il obéit jamais vraiment », p.398 (il parle de Diadorim).

« Comment puis-je savoir si c’est pour la joie ou pour les larmes que je demeure captif de l’avenir ? L’homme est comme le tapir, il vit sa vie. Le tapir est l’animal le plus stupide… », p.403

« (…) j’ai vu mon sourire sur ses lèvres », p.406

« C’était pas ça : je voulais savoir ce qu’il pensait, au fond, de cette vie, à errer sans but ? » « Ben ça…On sait-y seulement ? J’ai déjà tant vécu et si rudement que j’ai perdu le goût de chercher à rien comprendre… » Il a dit ça, une bonne réponse. Mais j’ai discuté : « Alors, pour être vraiment un bon jagunço, faut d’abord et surtout pas connaître la raison de la vie… », p.412
è Jonathan Livingstone le Goéland de Richard Bach (œuvre postérieure).

« J’avais de la haine pour lui ? Une haine énorme. Seulement que je savais pas pourquoi. Je crois que j’éprouvais cette haine à cause d’une autre, cousue à elle, ainsi de suite, de l’avant à l’arrière, revenant toutes. En sorte que mon but dans la vie, depuis mon enfance, était de tuer Hermogenes. », p. 414

«  J’ai permis à mon corps de désirer Diadorim. Et mon âme ? Je me souvenais de son odeur. Même dans ces ténèbres je tenais la finesse de ses traits que je pouvais pas voir, mais que je me rappelais, gravée dans mon imagination. Diadorim, même vaillant guerrier, était fait pour les plus grandes tendresses, j’éprouvais un soudain désir de baiser ce parfum sur son cou, là où s’adoucissait la dureté de la mâchoire, du visage…La beauté…qu’est-ce que c’est ? (…) La beauté, c’est la forme des traits de l’un pour que ça devienne la loi de l’autre et fixe son destin…Et j’étais forcé d’aimer ainsi Diadorim en secret, sans prononcer une parole », p. 416
è Magnifique. Comme je le comprends à propos de la finesse des traits d’un visage que l’on aime, liés indissociablement à l’âme.

« Vivre, n’est-ce pas, c’est très dangereux. Parce qu’on le sait pas encore. Parce qu’au fond apprendre à vivre, c’est ça la vie. Le sertão me produit, puis il m’a avalé, après il m’a recraché hors de sa bouche chaude…Monsieur croit mon récit ? », p.422

« Y a pas de diable ! C’est ce que je dis, à moins qu’il existerait…Ce qu’existe, c’est l’homme, l’être humain. Un passage. », p. 439
è C’est ce que disait Ludo de lui-même et ça m’avait beaucoup peinée. Le fait est que je vais le revoir après six ou sept ans. Je suis contente.